• Volkswagen, Toshiba: Lorsque la triche domine la loiIl faut lire un certain nombre de grandes affaires actuelles avec un peu de pragmatisme. On vient d'avoir droit à la gigantesque fraude de Volkswagen; il y en a une autre chez Toshiba qui concerne, elle, la comptabilité truquée de l'entreprise (on voit sur la photo, les patrons s'excuser à la japonaise). Et le genre vient de s'enrichir d'une enquête de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) qui a constaté de « nombreuses anomalies » concernant la sécurité des cigarettes électroniques. Réalisée en 2014, cette campagne de vérifications conclut à une non-conformité de 90 % des liquides prélevés et de près de la totalité des chargeurs. Lorsqu'on en est à des échelles aussi considérables, il est rigoureusement invraisemblable que les complicités internes dans la mise en place de procédures irrégulières n'aient pas été nombreuses.

    Dans un cas - Volkswagen- il a bien fallu que des ouvriers installent le logiciel frauduleux. Je veux bien que beaucoup ne savaient pas à quoi il servait, mais, très probablement, il a fallu qu'on tienne un discours de justification vis-à-vis des plus compétents des techniciens, assurément des ingénieurs. Ca fait du monde. Chez Toshiba, il est fatal qu'un certain nombre de comptables, même à des échelons moyens, aient été informés, au minimum suspicieux. 

    Ceci implique qu'on a tenu à ces gens de rang intermédiaire un discours de justification de ces pratiques qui faisait comprendre que la loi de l'entreprise était supérieure à la loi tout court. Et c'est apparu à ces personnels comme acceptable. 

    Lorsqu'on y réfléchit bien, on se dit que c'est très vraisemblable, que peut-être même cela pourrait arriver dans nos entreprises, je veux dire celles où nous avons travaillé. Après tout, il nous arrive de trouver la loi illégitime, de trouver des procédures trop lourdes, trop longues, etc. Alors, comme dirait l'autre, on "s'arrange".

    Il est intéressant que les deux affaires en cause concernent des entreprises qui ont un considérable "discours d'entreprise", où pratiquement on naît pour y mourir, qui sont, en quelque sorte, des "sociétés" (non pas commerciale, mais des univers de vie) à elles seules. Il est de notoriété publique que beaucoup d'entreprises développent des efforts considérables - et financièrement onéreux- pour obtenir la cohésion de leur personnel, pour imposer un langage commun, une doctrine. Une loi?

    Je ne crois pas qu'il soit possible d'évaluer le nombre d'entreprises où des pratiques disons sportives se font en raison de cette domination du discours interne sur la loi commune. Mais je parie que ce nombre est important. Sans doute ne va-t-on pas jusqu'à des fraudes de l'ampleur de celle de VW. Mais la somme des petites fraudes risque de faire beaucoup.


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  • Poste, banque: le grand abandonDonc la Société Générale va fermer des guichets abaissant la qualité de son maillage territorial. Pour ce qui est de l'ensemble des postes à travers l'Europe, le mouvement est engagé depuis longtemps. Quiconque a une bonne expérience de la vie en secteur rural sait l'appauvrissement en encadrement médical. Je crains fort que mes lecteurs urbains n'en ait aucune idée, au point que se diffuse une vague inquiétude sur la sécurité médicale de chacun. Mais, il ne faut même pas aller chercher profondément dans les profondeurs du territoire. Un de mes proches, qui fut médecin en Grande-Bretagne, me disait qu'une partie de son métier consistait à faire passer pour des urgences des interventions banales parce que, s'il ne le faisait pas, ces interventions à priori bénignes deviendraient graves l'attente se prolongeant.

    Continuons. Achetez du beurre à la campagne. Le réseau commercial global s'est terriblement détérioré. On en est au point où le relais est pris, depuis des années, par des épiceries associatives tant on s'est rendu compte qu'il ne s'agit pas seulement de commerce, mais tout simplement d'un minimum d'encadrement qui assure un confort de vie. Je ne parle bien sûr ni des trésoreries, ni même des gendarmeries, le comble étant que ce sont des gouvernements de droite, réputés sécuritaires, qui ont porté les coups les plus rudes à cette dernière forme de maillage. Et plus rien à dire sur les églises ou les temples. 

    Le désencadrement de nos nations - car le phénomène dépasse amplement la France- est un fait majeur qui, de proche en proche, construit un sentiment d'insécurité. Il y aurait une certaine logique à ce que les citoyens, voyant cette tâche d'huile - la banquise brune- se développer, décident résolument de s'organiser pour toutes choses hors des réseaux historiques. Jusqu'au jour où ils ne trouveront plus légitimes que ce soit des services d'État qui interviennent: "Vous nous avez laissé tomber? Eh bien, maintenant nous prenons les choses en main. Fichez le camp". Et on verra des milices locales exercer la sécurité, par exemple, des parents se regrouper pour assurer, hors de tout contrôle, l'enseignement à leurs enfants. Et ce ne sera pas illégitime. L'autorité se mérite. Pour pouvoir assurer la sienne, un État doit prouver qu'il est capable d'offrir le minimum de services. Or, il y a belle lurette qu'il se retire.Et même les relations aux réseaux historiques du secteur privé (banques, concessions automobiles, commerces) ne peuvent que s'aigrir. Car la proximité, la disponibilité sont des droits de base pour chacun. Et on voit bien que, pour beaucoup, l'emmerdeur est devenu le client, et la disponibilité à son égard est devenu une charge.


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  • Volkswagen seulement?J'avais eu la curiosité de regarder, le jour des révélations concernant Volkswagen, les cours de bourse de Peugeot, convaincu que le malheur de l'un ferait le bonheur de l'autre. Eh bien c'est en réalité l'exact contraire qui s'est produit:  l'action Peugeot a perdu 10% de sa valeur en deux jours. D'où, évidemment un peu de gamberge. Se pourrait-il que, dans les milieux boursiers, probablement bien informés, on ait de lourds soupçons sur les pratiques globales du milieu automobile en matière de dépollution?

    M'est alors revenu à l'esprit un bout de conversation que j'avais eu avec un spécialiste furieux de voir que les constructeurs européens se gavaient de subventions bruxelloises pour lancer de supposées études écologiques qui ne débouchaient jamais sur rien. Je ne connais rien aux particules fines, ni à aucun des procédés en cause, mais je dois dire que la vraisemblance d'une pareille hypothèse me paraît à considérer.

    Parce que l'écart entre les discours publics et les pratiques atteint parfois les dimensions d'abysses. Boeing, dans les très libéraux USA, est massivement soutenu par son gouvernement, par le biais habile de contrats militaires. De même pour le monde agricole américain, bien plus subventionné que les paysans français. Et nous, comme des cons, on dérégule comme des fous tandis que les théoriciens de la dérégulation ne le font eux-mêmes pas. Lorsque les bornes sont franchies, il n'y a plus de limite. Alors entre ce qu'on annonce en matière de voiture "propre" et la réalité...

    J'aimerais bien être, en ce moment, comme une souris dans les cabinets de nos ministères où l'on doit appeler comme des fous Peugeot, Renault, etc. pour s'assurer: "Vous êtes vraiment clean, les gars, c'est sûr, sûr, sûr?" Parce qu'évidemment ça ferait tout drôle si, dans dix jours, comme par hasard, on voyait la liste s'allonger.


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  • Au moins, c'est clair. Le patron de Volkswagen USA a reconnu la fraude de façon abrupte. Le choix des mots n'est pas neutre. Il veut attirer la sympathie du public par une franchise brutale. Ne nous y trompons pas: on est dans de la com' à 1000%. Ne doutons pas que dix conseillers se sont pressés autour de lui pour choisir entre la formule: "Ce que nous avons fait est à chier", ou bien "Nous sommes des sales cons".  On veut bien avoir l'air de benêts mais dans des limites raisonnables. 

    Maintenant, il serait passionnant de connaître le fond de l'affaire que, bien entendu, nous ne saurons jamais. On l'a compris ... dès qu'on nous a annoncé la totale transparence. Car, dans cette affaire, il ne peut pas y avoir de transparence. L'enjeu est trop important. En gros, il y a deux options: soit dans la gigantesque machinerie humaine qu'est une entreprise de cette taille existent des sous-départements, des cellules obscures qui travaillent avec - comment dire? - leurs ...méthodes. Il ne faut pas se raconter des histoires: elles existent partout, ces petites unités qui estiment n'avoir de comptes à rendre à personne et qui mènent "leur" politique. On aimerait, on voudrait pouvoir dire que toutes les grandes organisations dans un état de droit sont sous contrôle. Je ne n'y crois pas.

    Soit ce qui s'est produit est le fruit d'une politique délibérée. Michael Horn, le PDG du groupe mondial, savait fort bien, mieux même l'ordonnait. Dans tous les cas de figures, il est responsable. Il est intolérable sur le principe qu'on passe quoi que ce soit. Mais chacun voit bien que la première éventualité est aussi grave que la seconde. En particulier parce qu'on est en droit de penser que dans d'autres entreprises, d'autres déviances de ce type peuvent se produire. C'est hautement probable, très inquiétant. Mais indémontrable.

    Je me permets de rappeler que le 12 août déjà, je signalais les faiblesses de VW ici.


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  • Comment les pays commencent leurs déficits

    Ce document de l'Economist est intéressant: il montre comment les nations touchées par des forts déficits budgétaires les ont réduit. On constate par exemple que la France a recouru  massivement à l'impôt, encore que, comme l'on sait, le vent vient de tourner depuis près de deux ans. L'objectif de l'hebdomadaire britannique était de montrer combien les Grecs ont été plus vertueux qu'on ne le disait. Le dessin est très parlant: les coupes dans les dépenses sont absolument massives. On remarquera que les grands libéraux américains n'ont pas peur, eux aussi de recourir largement à l'impôt.


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  • Eric Le Boucher, dans un texte remarquable publié par les Échos,
    vient de souligner que non seulement les mouvement migratoires ne vont pas cesser mais qu'elles vont s'accroître nécessairement et dans des proportions spectaculaires en provenance de l'Afrique. Le document que je publie ci-dessus va dans le même sens. À fort juste raison Le Boucher fait observer que la seule manière d'y parer relativement, c'est un soutien massif, considérable à des nations dont certaines, comme le Niger, vont voir leur population exploser. 

    Ce qui est terrifiant, c'est ce sentiment qui nous est imposé par un minimum de réalisme que personne n'est capable d'entendre pareil discours actuellement. Nous sommes dans un moment d'immense repli sur soi où les seules idées tournent autour de "centres de tri" dans les pays d'origine. Tu parles d'une solution! Même la lumineuse politique hongroise de mur pour empêcher le transit par son territoire est tout simplement ridiculisée.

    Comment combattre l'autisme du moins chez nous, où les manifestations de sympathie aux réfugiés ont été bien maigres? Même d'avoir un pape avec soi - et ne lui chipotons pas notre reconnaissance, il a été très net- ça ne suffit pas. On a même vu, chose incroyable, le patron des patrons, Pierre Gattaz, qui ne passe assurément pas pour un homme de gauche, se fendre d'une tribune pour dire que ces migrations pouvaient être porteuses d'éléments positifs. Le Figaro - leFigaro!- vient de se faire l'écho d'une étude faisant un sort à de supposés impacts négatifs de l'immigration. Au demeurant, cette étude souligne fort justement la médiocrité de nos politiques d'intégration.

    Mais non, nous sommes comme figés, laissant cette catastrophe planer sur nos enfants. Et ce qui est assez inquiétant est que la France est moins bien placée que de nombreuses nations dans cette matière. C'est un peu de notre âme qui s'est évaporée.


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