• Ben putain, j'ai pas envie de ça

    Ben putain, j'ai pas envie de çaCa y est, maintenant, je sais: je suis un vieux con ou un sale réac. Je viens de lire un article à la fois terrifiant et passionnant de Jacques Attali qui nous annonce le triomphe ferme, définitif, sans appel de la ville, que dis-je la métropole: "Trois milliards et demi de personnes à travers le monde vivent aujourd'hui dans une ville. Elles seront 5 milliards dans quinze ans et 7,5 milliards à l'horizon 2050. Les métropoles abritent des bassins de compétences, de capital, d'information, mais aussi d'innovation. Ces bassins de classes créatives, caractérisées par leur goût pour le neuf, se sont organisés à travers l'histoire autour de « coeurs » urbains qui, l'un après l'autre, ont donné le ton à la croissance économique". (Il veut dire quoi là: que le monde rural n'a pas le goût du neuf? Mais il ferait bien d'y aller voir! Je crois l'exact contraire. Le monde rural, vivant dans des conditions malaisées, est souvent innovateur.)  "Les grandes métropoles mondiales sont déjà, pour beaucoup de pays, le moteur de l'économie nationale dans des contextes d'urbanisation macrocéphale. C'est le cas de villes comme Londres, Mexico ou encore Paris. L'Île-de-France, avec plus de 10 millions d'habitants et 600 milliards de PIB, générés principalement par l'agglomération parisienne, représente un tiers de l'économie française . (...)"

    Ben putain, j'ai pas envie de çaBen putain, j'ai pas envie de çaLES ÎLES-VILLAGES.- Et il paraît que c'est super-bien, que les métropoles c'est l'avenir, qu'elles vont même bouffer jusqu'aux nations, alors les villages, la campagne, vous pensez bien. Et l'enthousiaste Attali de prophétiser:   "Les métropoles devront adopter une stratégie de développement intégrée avec les espaces ruraux avoisinants, en promouvant le développement rural et une amélioration de la qualité de vie des populations concernées. (Mais bon sang, j'emmerde les métropoles! Je veux décider comme un grand!) Le phénomène de rurbanisation est déjà observable aujourd'hui en France. Mieux encadré, avec des moyens de transport appropriés, il peut être porté par le développement des métropoles. Ces dernières peuvent bénéficier aux populations rurales en leur offrant des opportunités d'emploi, ou des conditions de vie améliorées. Il ne faut donc pas voir l'urbanisation comme un problème, mais bien comme une solution. (Mais, tonnerre de Brest, quelle représentation a-t-il du monde rural! Ils ne se débrouillent pas mal ces ploucs!)

    Cette mise en valeur du territoire passe aussi par un plaidoyer pour la « villearchipel » (Jean-Paul Auby). La métropole peut être dense en son centre, mais vivre en harmonie et bon voisinage avec des « îles-villages » qui accueillent des trames vertes composées de terres agricoles et des trames bleues de cours d'eau, et s'approcher ainsi de l'autosuffisance en énergies renouvelables. L'idée est de mettre la campagne dans l'ensemble métropolitain. Le rapport du citoyen à la nature, à l'alimentation, en sera transformé ; l'agriculteur deviendra un citoyen pleinement intégré à l'aire métropolitaine."

    Il se trouve  que j'ai déjà eu l'occasion d'écrire sur le sujet:

    Télécharger « plus c'est gros plus c'est bon.odt »

    Contrairement à d'autres, je prends Attali très au sérieux parce que je sais pertinemment qu'il incarne cette élite visionnaire qui influence très fortement toute la galaxie du pouvoir. Plutôt la galaxie des pouvoirs. Attali n'a pas conseillé successivement Mitterrand et Sarkozy parce qu'il était opportuniste. Il les a conseillés parce qu'il les fascinait. Il ouvre la bouche et il leur donne l'impression d'être intelligents. Eux qui passent leurs journées à suivre un emploi du temps Ben putain, j'ai pas envie de çaconstruit par d'autres et où ils se collettent à des problèmes triviaux, il leur apporte soudain une bouffée d'oxygène. Ils pourraient prendre du shit mais quand même, comme présidents, ce n'est pas recommandé. Alors, ils l'écoutent à l'heure du thé. Et toute la camarilla qui veut plaire autour d'eux transforme les visions du gourou en réalités qui, lentement, se construisent pour de bon.

    Ben putain, j'ai pas envie de çaUNTERMENSCH.-Ce que ceci veut dire, c'est que d'ores et déjà, il n'y a plus de pouvoirs aux ruraux. Il y a deux catégories de citoyens: ceux des villes en fonction desquels on décide et les ploucs du monde rural qui ne sont que des untermensch du système.

    Ben putain, j'ai pas envie de çaManque de pot, moi je suis villageois dans l'âme. C'est comme ça: l'église, la fontaine, le bistrot. Je ne suis pas assez intelligent pour vivre dans le monde de super-héros que décrit Attali. Moi, les "îles villages", je n'en veux pas, les "trames vertes" me font chier. Je veux de l'humanité, savoir que Machin est malade, que chez les Choses le couple bat de l'aile et que c'est normal vu ce que s'enfile le mari. Mon gourou c'est le patron du bistrot à côté de chez moi. C'est une idée simple, putain: je veux qu'il y ait des hommes. Dans son texte, je n'en vois pas un seul.

    Je ne sais pas si Attali VEUT cela. Je sais qu'il le prophétise. Et je crains fort qu'il ne le souhaite. Mais c'est par une manière d'exercice intellectuel. Or, on ne vit pas dans des exercices intellectuels. On vit dans des murs.

    Ce qui m'ennuie terriblement, c'est que je sais pertinemment qu'Attali, très probablement, nous décrit notre avenir. Et je le déteste.


  • Commentaires

    1
    serge
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 17:20

    et ils boufferont des pavés ????? 

    2
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 17:25

    @ serge: bien vu

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