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Par gervanne le 24 Novembre 2015 à 08:11
Il y eût, en France, en 1983, des élections municipales qui furent une déroute pour la gauche. A cette occasion, Serge July, le patron alors de Libération, eût cette excellente formule: "Chaque fois que Louis Mermaz ouvre la bouche, la gauche perd une ville de 10 000 habitants". Et, en effet, le PS avait sorti de leurs niches un certain nombre d'aboyeurs qui exaspéraient l'opinion pour leur hauteur et leur manière péremptoire de s'exprimer.
Heureusement que l'expérience ne sert à rien. Car la droite qui, tout de même, devrait avoir quelques archives, commet à nouveau cette erreur à force de s'être mise - du moins pour sa faction la plus hystérique- sur le mode roquet . Il va de soi que la situation présente est très usante pour ses nerfs: un opposant, ça s'oppose. Sauf qu'il y a des circonstances, où ça doit se taire. C'est dur, c'est cruel, mais c'est ainsi. Car lorsque n'y tenant plus, au lieu de faire dans le discret et dans le feutré, on retombe dans l'aboiement de caniche, on est ridicule. Roquet, c'est un métier.
Or, les sempiternels aboyeurs, ceux qui, en toute hypothèse, aboieront même le jour de la mort du Président de la République - j'ai bien sûr nommé l'extrême droite- seront toujours meilleurs que les autres. Question d'entrainement. Ceux là, peur de rien, tirent des salves à jet continu sans le moindre souci de cohérence. La cohérence, ça n'est pas leur sujet. Leur sujet, c'est le bruit. On les mesure en décibels, pas en arguments. Oui mais M. Sarkozy a été président de la République, M. Wauquiez, ministre, et j'en oublie. Donc des gens aux responsabilités, comme l'on dit.
Responsabilités? Où ça? Lorsqu'on entend préconiser des mesures qui sont en application depuis sept ans (relativement au cursus des imams) et qui ont même été lancées par la droite ou bien qu'on demande une mise en camps des 4000 détenteurs de fiches "S", on est en plein potage. Un des malheurs de tous ces leaders, comme, du reste, de tous les autres, c'est qu'ils vivent sans arrêt dans un univers de militants. Or les militants (de moins en moins nombreux) ne représentent pas la société. Ils sont au contraire ceux qui s'en sont détachés pour la conduire.
Car le simple électeur de droite n'est pas le colleur d'affiche excité des Républicains. C'est un gars plan-plan, qui n'aime pas trop que ça bouge ni qu'on lui pique des impôts. Ca n'est pas un hystérique du Front National. Et il ne devrait pas suffire que quelques militants influents dans l'entourage des dirigeants aient bu de la mauvaise potion pour que tout l'électorat conservateur en soit changé. Hélas, Sarko et les siens sont prisonniers d'un virage qu'ils ont pris dans la rage de n'avoir pas su conserver le pouvoir. Ceux des électeurs qui vraiment veulent de la radicalité voteront Front National. Et la gauche, comme l'espère Hollande, apparaîtra alors comme le seul rempart contre ces discours. Mais que la droite ne vienne pas pleurer. Elle s'est enfermée toute seule.
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Par gervanne le 27 Octobre 2015 à 21:14
Malek Boutih a donné du crédit ces jours-ci à l'hypothèse de l'élection de Marine Le Pen à l'élection présidentielle. Mettons. Je me demande pourquoi on n'a pas essayé de se projeter un petit peu plus loin. MLP est élue et suivent donc des législatives. Jusqu'ici les Français ont, avec constance, donné au président qu'ils avaient élu une majorité parlementaire même si, entre parenthèses, dans toutes les autres élections intermédiaires depuis 2002, il n'est JAMAIS arrivé qu'elles soient favorables au pouvoir en place.
Législatives donc et voici le Front National obligé d'aligner cinq cents et quelques candidats. On se retrouve alors dans un cas de figure que nous connaissons bien pour l'avoir de nombreuses fois vécu: de parfaits inconnus vont devoir concourir. C'est, en effet, la caractéristique du Front National d'avoir au mieux vingt personnes qui tiennent la route et après... On m'objectera que les Français pourront à nouveau donner à la présidente une majorité. Dire cela c'est méconnaître le fond de nos campagnes.
À l'exception des zones totalement urbaines, les électeurs connaissent leurs parlementaires fut-ce vaguement. Et je considère comme aventureux d'imaginer comme vraisemblable l'élection, un peu partout, de parfaits inconnus, étant notamment entendu qu'ils auront à l'emporter sur des personnages eux localement connus.
Donc la vraisemblance que MLP se retrouve alors devant un parlement hostile est notable. On imagine l'hystérie de ceux qui, alors, considéreront qu'on leur a volé leur victoire et la stratégie de tension permanente qui en résulterait. Avec les conséquences accessoires que ça aurait pour notre crédibilité internationale: pays affaibli, moins de crédit, ce serait très inquiétant. On me dira que j'avalise sans y regarder à deux fois l'élection de MLP. Bien sûr. Mais précisément, une des raisons pour ne pas laisser faire est cet épisode suivant que je viens d'évoquer.
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Par gervanne le 13 Septembre 2015 à 02:48
C'est un petit livre, un "quick book" comme disent maintenant les éditeurs, mais il faut l'avoir lu. Robin d'Angelo et Mathieu Mollard donnent, par leur "Le système Sorral, enquête sur un facho business" (Calmann-Lévy), une confirmation aux intuitions que l'on pouvait avoir sur l'homme du "Je suis Partout" sur Youtube.
Alain Soral, comme l'on sait, a réussi à devenir un polémiste d'extrême droite écouté via les réseaux sociaux et tout particulièrement ses vidéos sur Youtube. Le succès l'a autorisé à monter Égalité et Réconciliation, singulière entreprise - au sens plein du mot- mélange d'idéologie antisémite, de mouvement de promotion de son pote Dieudonné. Mais aussi - les observateurs avertis s'en doutaient- gros business qui vend non seulement des livres, mais des produits bio, du pinard et des stages de survie.
Tous ceux qui, comme moi, l'ont suivi d'un peu près, avaient compris, au premier visionnage, devant quel confusionnisme mental on était, quelle entreprise de recyclage d'idées dont les plus récentes datent de 1920, tout un discours construit sur la détestation. Tout ça puait le fric aussi. Le travail de ces deux journalistes de Street Press le confirme.
Bien entendu, pour que tout cela marche, il faut une posture, celle du prophète et de la victime, ce qui d'une certaine manière revient au même. Alain Soral a génialement su mettre le système devant une de ses contradictions. Sa posture contraint les pouvoirs publics à le poursuivre en justice. Mais à chaque fois, Soral paraît davantage une victime, ce qu'il sait fort bien vendre. Et lorsque ce n'est pas lui, c'est son avocat, comme ici:
Ce qui est impressionnant est que ce soit internet qui ait permis le déversement de tant d'ignominies et que ce soit articulé avec un tel sens du pognon. On me dira que l'homme (en général) n'est pas bon et qu'internet, qui sait remarquablement démultiplier les textes et les images, nous en amplifie en permanence le spectacle des vices. Mais il faut bien dire que, dans le cas de Soral, boutiquier rance mais malin de l'antisémitisme, plus généralement du racisme ou de l'antiféminisme , on atteint des sommets. Et le plus triste est que, périodiquement, des braves gens s'y font prendre, quand ce ne sont pas des intellectuels qui aiment l'odeur du soufre et qui vont poser auprès de lui.
Sa soeur, l'actrice Agnès Soral, avait dit de lui au Nouvel Observateur: "Je ne côtoie plus mon frère depuis des années et par Alain, le nom "Soral" est en train de devenir un adjectif qualificatif pour désigner la haine et une idéologie que je ne partage pas. Je ne peux pas l'accepter !" Et, avec la délicatesse qui le caractérise, Alain Soral avait alors répondu ceci: Ma sœur est le genre de femme qui aurait été tondue à la Libération.» Puis, deux jours plus tard: «Encore merci pour la pub! (Pour le reste on réglera ça à la libération, j'ai déjà la tondeuse...)». Voilà l'homme. Tout est dit.
Malheureusement, ce succès est aussi un témoignage d'un état de l'opinion et le signe de la défaite de tous ceux qu'un minimum de sens moral tient à l'écart de ces excès. Il est juste de dire que le succès de Soral est à la mesure du vide idéologique qui prévaut. Ca n'est pas flatteur pour notre époque.
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Par gervanne le 5 Septembre 2015 à 09:09
Il y a une manière de génie dans l'extrême-droite à véhiculer en son sein des haines incommensurables. J'engage ceux qui en douteraient à visionner ce montage que j'ai fait d'un entretien entre deux dirigeants d'extrême-droite: Vincent Reynouard, dans la vidéo le questionneur et celui que l'on voit à l'écran, Jérôme Bourbon, le patron de l'hebdomadaire Rivarol qui fédéra dès l'après-guerre les pétainistes, les antisémites, les révisionnistes, etc. Au passage, petite surprise: Vincent Reynouard était censé être en prison pour récidive dans ses propos révisionnistes après une condamnation à une peine ferme. Mais la justice, dirait-il, est sans doute trop douce...
Au passage, on notera le licenciement de Martial Bild de Radio Courtoisie par Henri de Lesquen, patron de cette radio au motif que Martial Bild travaillait aussi pour la TV d'extrême droite, TV Liberté et un autre licenciement à Présent, tous pour diverses divergences idéologiques qui, étant donné l'incroyable proximité d'idées de ces hommes, révèle des querelles microscopiques mais non sans conséquence.
Rien que du beau monde, en tous cas qui fait dans le délicat. On le voit ici dans le tombereau d'insultes que Jérôme Bourbon déverse sur Marine Le Pen.
En revanche, on reste assez stupéfait de voir la rédaction d'I Télé confiée à un catholique traditionnaliste, collaborateur de Boulevard Voltaire et épisodique participant à Radio Courtoisie.
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Par gervanne le 16 Février 2015 à 17:16
Les sondages nous viennent en rafale après la législative du Doubs et avant les élections départementales. Ils nous disent à la fois l'indifférence des électeurs au consigne, l'allant du Front National, mais, en même temps, un large désaccord sur ses thèmes.
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Par gervanne le 12 Janvier 2015 à 06:14
Mauvais dimanche pour le tandem Zemmour-Houellebecq. Les boutiquiers du déclin et les profiteurs de la soumission vont retrouver leurs bouquins chez les soldeurs. Car comment faut-il qualifier ce que nous avons tous livré de nous-mêmes en ce 11 janvier où plus de 4 millions de Français sont descendus dans les rues? S'il y a vraiment un mot à éliminer, c'est déclin. Soumission, je n'en parle même pas.
Je suis immensément touché par les trésors d'imagination rigolarde -regardez ces photos!- qui ont été réunis, hors de toute coordination, par des individus, chacun de son côté, pour faire passer son message. C'est un signe, mon cher Éric, mon cher Michel, de décadence accélérée d'un peuple amorphe: n'en doutons pas.
Ce qui est le plus troublant - parce que c'est ce qui est si contraire à notre tempérament apparent- c'est l'unité affirmée dont tous les témoins nous parlent. La volonté d'être ensemble. La volonté, alors, de dire: "Juifs, musulmans, ou quoi que ce soit d'autres, nous sommes Français"? Oui mais ça ne clarifie pas les choses. Nous sommes Français DONC nous aimons la liberté? DONC nous ne voulons pas de la violence? Il y a de cela, sans doute. Mais tout de même, au point de mobiliser une foule pareille? Jamais dans notre Histoire! Quatre fois ou presque le nombre de Français dans les rues à la Libération, deux fois celui des funérailles de Victor Hugo, dont j'ai rappelé ici le caractère politique.
SORTIR DE CHEZ SOI.- Il y a aussi autre chose, plus complexe: un élan pour dire: "maintenant ça suffit, nous prenons les choses en mains". Une sorte de rejet d'un discours ambiant et d'un certain cours des choses. Je ne veux pas faire passer au second plan les attaques terroristes. Je formule ici l'hypothèse qu'elles ont donné le courage pour mettre son manteau et descendre les escaliers. On grognait chez soi, on ne se reconnaissait pas dans la caricature que les médias audiovisuels nous renvoyaient. Trop, c'est trop. Alors on est allé se montrer, tranquille, serein, je n'ose écrire gai, vues les circonstances, mais pas loin. Regardez les photos: c'est une foule joyeuse, peinarde. J'étais moi-même dans une petite ville de France, deux jours avant, dans un cortège. C'était calme, solide, droit dans ses bottes. Et on en profitait pour échanger des nouvelles du petit dernier.
Ce n'est pas- c'est vrai- l'image qu'on nous renvoie de nous-mêmes. D'un peuple tranquillement sûr de lui, avec des valeurs bien ancrées. Et, au passage, en dépit de la moue des chipoteurs, quelle impression, tout de même, de voir une cinquantaine de dirigeants mondiaux venir à Paris, parce que, comme l'a si bien dit Matteo Renzi, "si c'est Paris qui est touché, c'est l'Europe qui est touchée". Pour la France à terre du couple Zemmour-Houellebecq, ça se pose là, quand même.
Alors, nous voici avec cet immense présent, cette image infiniment plus positive de nous-mêmes. Nous ne sommes pas ceux qu'on disait. Les "observateurs" sont sur le cul. Bien sûr, on s'est remis à lire sur les réseaux sociaux les litanies de ceux qui veulent dresser ceux-là contre ceux-ci, monter un petit coup politique bien dégueulasse, mais voilà que tout cela est soudainement vieux, plein de poussière. Nous savons que ceux qui écrivent cela ne savent rien parce qu'ils n'avaient rien vu venir. Un immense coup de balais. Mon pauvre Zemmour, là, tu viens de passer l'arme à gauche, vite fait, bien fait. Tu es hors sujet à pleins tubes. Pas bon pour ton petit commerce. Et pour le tien non plus Houellebecq.
L'IMMENSE FRAGILITÉ.- Je ne voudrais pas avoir une parcelle de pouvoir politique demain. Parce que je crois bien que ce qui a bougé conduira le peuple de France à vouloir être mené autrement. Et comment? On sent les lignes bouger à toute vitesse, mais on n'en sait rien.
Cela laisse le problème entier. J'ai déjà eu à l'écrire. La France s'est fait un cadeau à elle-même. Il ne faut pas le casser en défaisant le paquet. Il faut en tirer parti, construire ce qui peut l'être avec une conscience immense de la fragilité de ce que nous avons dans les mains.
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Par gervanne le 25 Octobre 2014 à 15:20
Je découvre dans un article du Parisien une de ces histoires qui fait frémir sur le niveau de précarité intellectuelle, de confusion mentale que l'on peut rencontrer de nos jours. Maxence Buttey est conseiller municipal Front National à Noisy-le-Grand et il vient de se convertir à l'islam. On imagine l'enthousiasme de ses électeurs. Déjà l'itinéraire est parlant: "Il rate, écrit le Parisien, le concours d'entrée en médecine et s'oriente vers un BTS de gestion qui ne l'intéresse pas, avant de tout plaquer pour faire du droit à Paris". Ce papillonnage est révélateur. Faudra qu'on nous explique comment on peut, en toute rationalité passer de la médecine au BTS de gestion. La réponse est connue: il n'y a précisément aucune rationalité et c'est même le coeur de l'affaire.
TAUX D'INTÉRÊT.- « J'ai découvert l'islam grâce à un camarade, sur les bancs de la fac de médecine, à 19 ans, raconte-t-il. Nous avons beaucoup parlé, et j'ai été amené à m'interroger. J'étais catholique mais, en relisant la Bible, je me suis aperçu de toutes les incohérences. En lisant le Coran de manière approfondie, j'ai compris que cette religion est plus ouverte. »Maxence veut s'engager pour son pays, continue-t-il de dire au Parisien. Il dit trouver dans le programme du FN, lors de la présidentielle de 2012, de nombreuses similitudes avec l'islam : « Les deux sont diabolisés et très éloignés de l'image que les médias en donnent. Comme l'islam, le FN défend le plus faible. Le parti dénonce les taux d'intérêt exorbitants de la dette de notre pays. Et l'islam est contre la pratique de l'usure. »Ce passage est extrêmement intéressant. C'est en effet un signe de désarroi intellectuel pathétique de choisir sa religion en fonction de sa condamnation ou non de l'usure. Il est manifeste que la religion a un tout autre objectif quelle qu'elle soit. A ce compte, il est urgent que le boudhisme ait une position sur la pollution de l'air, le chamanisme sur les taux courts et les taux longs, le catholicisme sur les voitures électriques, le protestantisme sur l'écotaxe et l'orthodoxie sur les sièges pour bébés.Ce sont sur des critères d'une incroyable pauvreté que se détermine ce malheureux. Si ça se trouve, il a adhéré au Front National pour sa position supposée sur le suaire de Turin, après avoir quitté l'UMP pour son attitude vis-à-vis de la couronne d'épines. On pense aussitôt à Lacombe Lucien, ce garçon qui, pendant la deuxième guerre mondiale va basculer dans la collaboration au fond sans savoir pourquoi. Il ne voit pas de différence entre la milice à laquelle il va appartenir et la résistance. No comment.
VIDÉO.-Du reste, tant qu'à faire, on serait aussi intéressé de savoir pourquoi Maxence Buttey a adhéré au Front National. Le comble étant, bien entendu, qu'il ait été élu. "Le jeune élu, écrit plus loin Le Parisien, a du mal à croire à la version officielle des attentats du 11 septembre 2001. De même qu'il estime qu'il y a beaucoup de flou autour de l'affaire Merah. « Je suis contre le niqab, contre l'exclusion, jure-t-il, cette religion n'appelle pas à couper des têtes comme le pratique l'organisation Etat islamique. » Buttey préfère ne pas trop s'étendre sur le jihad. En revanche, il a envoyé, il y a quelques jours, une vidéo vantant l'aspect visionnaire du Coran aux cadres du bureau départemental du FN". On aurait voulu être là lorsqu'ils l'ont visionnée.
Incidemment, ceci offre un éclairage très instructif sur le niveau de recrutement du FN et la stabilité intellectuelle de ses recrues.
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