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La radio des grandes voix
La mort de Jacques Chancel nous fait, pour quelques instants, revivre des personnages qui étaient des grandes voix, je veux dire des beaux organes. Jacques Chancel avait une voix dans les graves remarquable, idem pour Jacques Paoli ou Jacques Chapus ce dernier avec une espèce de voix cassée par la cigarette.
Cette importance de la voix est tellement vrai qu'on en a eu un exemple jusqu'à la caricature avec Albert Simon sur Europe 1, le présentateur de la météo, qui avait une voix totalement brisée mais qui, justement, contribuait par là à l'identification de la chaîne.
Autre cas limite évidemment: celui de Macha Béranger: Là aussi une voix de grande fumeuse. On l'entend ci-dessous lors de sa dernière émission. J'ai toujours souri à l'idée qu'elle aît été la maîtresse de Louis de Funès auquel j'ai de la peine à l'associer.
C'est curieux d'ailleurs: Je vois, à propos de la mort de Joe Cocker, que la presse évoque sa voix rocailleuse ce qui est bien normal: il était chanteur. Mais, on y pense moins s'agissant des présentateurs de radio, probablement parce qu'on intériorise inconsciemment ce grand facteur d'intimité qu'est le timbre d'une voix. Macha Béranger avait une voix de la nuit, Etiennne Fernagut, son pendant de la Radio Suisse Romande, de même. A midi, ça n'aurait pas marché.
Ci-dessous, Jacques Chancel avec ce merveilleux écrivain qu'était Romain Gary.
C'est une période pour moi bénie d'une radio non segmentée, c'est-à-dire totalement grand public. J'ai fait un passage comme correspondant pour la Suisse de RTL. J'ai donc approché Henri Marque et Jacques Chapus ( PHOTO) par exemple dont on a oublié que c'était tous des anciens de France-Soir. Mais pas le journal de caniveau, le grand France-Soir, popu sans honte, que lisait mon père, professeur d'Université. Mon sentiment est que ceci nous dit beaucoup de choses sur une fragmentation de la société. Je pense rigoureusement la même chose s'agissant de la presse écrite, de l'idée longtemps admise et qui a disparu qu'il y avait un rite du matin ou du soir avec le trajet marchand de journaux/ bistrot et petit blanc/cigarette. Ou le soir pastis, mais le journal toujours mêlé à ces rites. Ce temps est mort: nous vivons une époque de claustration et les seules personnes auxquelles on s'intéresse sont sur des écrans.
Il reste des îlots magnifiques de radiophonie un peu partout dans le monde. Mais la fragmentation est là. Faut pas pleurer si les tensions sont si vives.
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