• Affaire Laurent-Graciet: oui, mais il y a l'argent

    C'est un très singulier entretien que vient de livrer au Monde Éric Laurent, ce journaliste qui a été mis en cause pour chantage vis-à-vis du roi du Maroc avec sa coauteur, Catherine Graciet. D'abord, il est excellent que Le Monde ait mené cette interview. Mais c'est la suite qui est problématique.

    On devine - même si ce n'est pas exactement dit comme cela- qu'Éric Laurent vit un drame personnel, par la maladie d'une proche, qui le déstabilise, ce qui, bien sûr, ne peut lui valoir que notre sympathie. Et il affirme qu'on lui a fait des propositions de dédommagement pour arrêter l'écriture du livre auxquels il a bien voulu tendre une oreille complaisante, étant finalement hésitant sur le bien- fondé de son livre et dans une très mauvaise passe psychologique.

    Je suis tout prêt à croire qu'il y a eu manipulation, peut-être même exploitation de la situation personnelle difficile de l'auteur. Je veux même bien qu'il n'y ait pas eu chantage. Je suis convaincu que l'occasion de faire plonger le tandem Laurent- Graciet réjouissait le pouvoir marocain. Je commence à avoir un peu de peine avec cet auteur qui se met à douter de l'opportunité de son sujet. Dans ce cas, on ne signe pas avec un éditeur. Mais surtout il reste l'acceptation de l'argent qui n'est pas niée et qui est même traitée avec une sorte de désinvolture franchement pénible. Éric Laurent n'est, sur ce chapitre, aucunement convaincant. Le seul fait qu'il ait accepté deux autres rendez-vous après un premier où la question financière, de son propre aveu, a été clairement abordée, réduit sa défense à peu de choses.

    Il aurait pu y avoir une autre manière de présenter les choses à laquelle j'aurais pu croire: "Je vis des choses terribles. J'ai fait une connerie. Je me suis mis en situation de me laisser manipuler." Ma conviction intime est que là est la vérité. Simplement, elle n'a pas facile à dire. Et, malheureusement, Laurent veut garder son étiquette de cavalier blanc. Et là, il n'est absolument pas convaincant. Ajout ultérieur: Du reste Catherine Graciet, elle, vient de faire au Parisien, une réponse beaucoup plus franche.

    Il faut tout-de-même dire qu'il y a des milliers de journalistes qui ne passent jamais à la télé, qui ne publient chez aucun éditeur, qui ne donnent de leçons à personne mais qui ne touchent pas d'enveloppe. Le peu de sensibilité d'Éric Laurent au dommage fait à l'image de la profession est assez décourageant. J'ai, dans cette affaire, de la peine pour les petits, les sans-grades. Tous ceux, en somme, qui sont éclaboussés mais ne peuvent rien dire. Car, au total, on a une seule certitude. Ceux là vont dix fois entendre: "De toutes façons, tu es comme les autres, tu es vendu à ton maire, à ton député, à ton président." Cela du moins est assuré.


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