• Bientôt, le client devra payer pour acheterLes évolutions de ces dernières années en matière de commerce montrent une dérive inquiétante. Les grands réseaux de commercialisation (FNAC, Darty...) proposent une variété sans cesse plus maigre de produits avec, j'imagine, une focalisation sur quelques produits à forte marge et à vocation grand public. (À cet égard, il faut être aveugle pour ne pas voir que dans les rayons de librairie, un nombre restreint de titres est ostensiblement mis en évidence).  Dès qu'on tend vers un produit un peu plus spécifique, souvent de meilleure qualité ou, disons, plus exigeant, il faut basculer vers l'achat par internet.

    Mais là, deuxième surprise: les réseaux de commercialisation par internet qui tendent à prendre une place croissante sont en réalité pour une part de leurs offres uniquement des plateformes de proposition, pas de fourniture. Pour le dire autrement, lorsqu'on passe une commande, elle est répercutée à un producteur qui n'a pas nécessairement encore mis le produit en fabrication.

    Moyennant quoi le client va devoir supporter tous les délais de fourniture. Ceci signifie que la fonction de commerce s'est profondément modifiée. On voit bien qu'une part de risque est ainsi éliminée à l'échelon du vendeur: L'invendu devient de plus en plus improbable. Il faut essentiellement être capable de mettre en place une plateforme de vente particulièrement sexy, mais, pour le reste, on distribue du courrier.

    Le client devient totalement tributaire de la qualité de la description qui lui est faite et qui, lorsqu'il s'agit de matériel un peu technique, n'offre aucune des possibilités de conseil et de questionnement que l'on avait autrefois. Une de mes très proches qui se fait une expérience dans le genre me disait récemment: "Tu sais, dans les grands réseaux, ce dont rêve les patrons c'est que le client aille directement au produit sans surtout rien demander au vendeur".

    On est, ainsi, en train de supprimer tout ce qu'il peut y avoir d'humain dans l'échange. Quand on songe qu'il y eût jadis une revue littéraire intitulée "Le Commerce" qui voulait judicieusement manifester par là que dans le mot "commerce", il y a échange, et qu'après tout l'échange des idées est bien un commerce au sens le plus large. Maintenant, à part le numéro de carte bancaire, l'échange est réduit à néant. Et on finira bien par trouver le moyen de faire payer le client pour qu'il paye...


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  • Non, le livre électronique ne marche pas

     

    Non, les liseuses ne marchent pasRegardez bien le graphique ci dessus. Il montre, pour la Grande-Bretagne, l'évolution relative des ventes au Royaume Uni. En gris, le total, en bleu les "vrais livres", en orange les livres électroniques. C'est tout-à-fait clair: le décollage du livre électronique est très lent. C'en est au point qu'une chaîne de vente de livres britanniques qui possède tout de même 280 magasins, Waterstones, quelque chose comme la FNAC, vient de décider de retirer de la vente les Kindle parce que les résultats étaient "pityful". Le patron de la chaîne a expliqué qu'il n'y avait virtuellement "pas de vente" à partir des Kindle que proposaient ses magasins.

    La vente des livres papier a repris. Sa progression est plus rapide que celle des e-books qui semblent plus spécialisés dans les livres scolaires. Le domaine du "vrai livre" semble être particulièrement celui du roman. Il est intéressant de constater aussi une reprise de la librairie indépendante.

    Une libraire interrogée par Le Guardian soulève une intéressante hypothèse à propos de son public de trentenaires qui passent leurs vies devant des écrans et qui, donc, sont contents de retrouver le "vrai papier". Une assez étonnante étude Nielsen montre que 75% des enfants veulent du livre papier et même que 35% refusent purement et simplement du livre électronique. Ce qui n'empêche pas Amazon d'être satisfait de ses ventes. Mais la question est probablement celle du vrai usage du Kindle, plus dédié à des lectures spécifiques qu'à l'ensemble de la production.

    Il est intéressant de rapprocher ces données de tendances françaises qui pourraient paraître franchement contradictoires. En 2014, les ventes de livres numériques en France ont progressé de 45% pour atteindre 63,8 millions d’euro. Sauf que, bien entendu, chaque fois qu'on manipule des pourcentages, il faut être très prudent: si les ventes de départ étaient très faibles le pourcentage de progression ne veut pas dire grand chose. On remarquera du reste, qu'en effet, en France les "liseuses" ne percent guère: En 2014 le taux d’équipement des français en appareils de lecture a poursuivi son augmentation : 35% des foyers disposent d’une tablette, 49% d’un smartphone et 3,5% d’une liseuse. Les lecteurs de livres numériques sont multi-supports puisqu’ils lisent aussi bien sur papier (62%) que sur leur tablette (39% des lecteurs numériques), sur leur ordinateur portable (36%), sur leur smartphone (27%) ou leur liseuse (23%).


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  • Comment les pays commencent leurs déficits

    Ce document de l'Economist est intéressant: il montre comment les nations touchées par des forts déficits budgétaires les ont réduit. On constate par exemple que la France a recouru  massivement à l'impôt, encore que, comme l'on sait, le vent vient de tourner depuis près de deux ans. L'objectif de l'hebdomadaire britannique était de montrer combien les Grecs ont été plus vertueux qu'on ne le disait. Le dessin est très parlant: les coupes dans les dépenses sont absolument massives. On remarquera que les grands libéraux américains n'ont pas peur, eux aussi de recourir largement à l'impôt.


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  • Notre époque est celle de l'instantanéité. Vite. Tout, tout de suite. Quelque chose se passe, nous le savons tout de suite et nous réagissons tout de suite. Donc nous surréagissons. L'affaire du krach boursier en est une parfaite illustration. Plus j'agis vite, plus je suis malin. La vitesse prend le pas sur l'analyse, elle donne le sentiment qu'on a agi et bien agi.

    Krach chinois: l'instantanéité qui tueJ'avais évoqué, avant tout krash, la sérieuse situation chinoise. Je m'amuse de voir que soudain, pour prendre le contrepied, on publie des analyses - du reste fort pertinentes- qui disent en gros: "du calme". On retrouve nos cours de maths: - multiplié par - = +. On aura fait, à toute allure, deux actions en sens contraire (je vends tout, j'achète tout), mais comme on aura agi, ce sera bien.

    La responsabilité d'internet, là dedans, est accablante. Comme il est facile de donner des informations et qu'en plus c'est gratuit, il faut en donner. Celui qui ne tire pas partie à fond des capacités de la toile est un nul. La question de savoir quelles informations, ce que c'est qu'une bonne information est définitivement passée au second plan. Il advient - c'est ce qui s'est passé avec la Revue XXI- qu'un jour une petite équipe prenne le total contrepied, privilégiant le temps long et la qualité. Et alors - gag- tout le monde fait pareil. Et parmi les copieurs bon nombre se cassent la figure.

    Par ailleurs, on laisse se développer une idée selon laquelle cette commodité d'expression dans la rapidité impliquerait la liberté. L'équation est aventureuse. Car si c'est la liberté de la merde, ça mérite d'être discuté. Je suis bien désolé de devoir écrire que 90% des bonnes choses sur le net viennent d'institutions anciennes, de grands journaux, d'universités, du Collège de France... Du reste, certaines de celles-ci ont été déstabilisées et, même si elles cherchent à se recycler sur le net, on ne jurerait point qu'elles dureront longtemps. Le Monde, Libération, combien d'années encore? Et on finira par dire que leur disparition est un progrès. Pas moi.


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  • C'est entendu: l'Allemagne vient de battre un nouveau record d'exportations au point que certains l'accusent de créer un déséquilibre à l'intérieur de l'économie européenne. Vieux refrain. Mais voici que vient une confirmation sur l'état de ses services publics. Le pays va -enfin- devoir investir massivement dans son armée qui est dans un état ridicule: 4 seulement de ses 39 hélicoptères fonctionnent; il y a peu un avion transportant un hôpital de campagne au Libéria n'a pu atteindre sa destination sans réparation  en raison de son état.

    Et voici que l'aéroport de Berlin, attendu depuis des années, sera encore renvoyé à une livraison plus tardive que l'an prochain, en raison de la faillite d'un fournisseur majeur, empêtré dans une affaire de corruption qui a déjà coûté pas moins que la démission du maire de Berlin. 

    Assurément, l'Allemagne bat de nombreux records, mais il faut bien mesurer le prix qu'elle paie pour y parvenir. Sans doute tient-elle incroyablement serrée la dépense publique, mais lorsque c'est le sacrifice du long terme sur le court terme, il y a lieu de s'en inquiéter. J'ai déjà eu l'occasion de signaler ici la parution de livres qui, en Allemagne, tirent la sonnette d'alarme: lire, par exemple, que le classement des universités allemandes est désastreux parce qu'on n'y consacre plus assez d'argent est évidemment préoccupant.

    Le fond du problème est très probablement le notable vieillissement du pays. En clair, les vieux qui sont si nombreux se moquent bien de ce qui pourrait advenir du futur: ils seront morts. On se souvient peut-être que, lors des dernières élections législatives qui avaient offert un nouveau bail à Angela Merkel, l'unanimité des observateurs annonçait cette victoire en raison précisément de cet âge moyen. "Les vieux n'aiment pas que ça change, disaient-ils, donc Angela Merkel sera réélue". Petit rappel qui donne une mesure de la violence des chiffres: le taux de fécondité de l'Allemagne est de 1,43 enfants par femme ce qui implique qu'on est très loin de pouvoir renouveler la population. D'où, du reste, une politique migratoire étonnamment favorable pour un gouvernement conservateur. 13, 5% de la population a moins de 15 ans, tandis que 20% ont plus de 60. Tout est là.

    Or, il résulte de cela des phénomènes très préoccupants: Il est notoire que ce sont les populations jeunes qui dépensent le plus, par comparaison avec les plus âgées (d'où la fameuse "ménagère de moins de cinquante ans"). Cela veut donc dire que le dynamisme économique du pays ne peut fonctionner que sous réserve d'écouler ailleurs les productions nationales. Il n'y a pas grand chose à attendre d'un marché intérieur. Les "vieux" tiennent le porte-monnaie fermé.

    La vraie force de l'Allemagne (et la faiblesse de la France) est celle de ses PME. Son modèle de développement ne repose pas sur des monstres. Mais le pays ne peut éternellement sacrifier ce qui le structure: routes, ports, etc. Son obsession des grands équilibres des dépenses publiques est une vision court-termiste. Et, on est là en présence d'une orientation qui ne va pas se modifier en 6 mois. Or si l'Allemagne sombre lentement, alors l'Europe y passera.


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  • Les sondages montrent combien les Français sont favorables à la loi Macron. Parce qu'ils ne se noient pas dans l'idéologie. Parce qu'ils voient bien qu'au quotidien, on déconne ferme. Et qu'il faut revenir sur terre. Pour une fois, ce n'est ni de droite, ni de gauche.

    LOI MACRON: TANT DE BRUITS POUR RIEN


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  • C'est comme au billard. L'affaire de la négociation de la dette grecque est un jeu à multiples bandes. Il n'y a pas seulement les Grecs contre les autres. Il y a les politiques contre les financiers, les jeunes contre les vieux, etc.

    POUR QUI EST VRAIMENT LE MESSAGE DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE?


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