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Le rétrécissement de Sarkozy
Laissons de côté l'affaire Morano mais attardons-nous à ce qu'elle dit du repli d'un homme. Pardon de me vanter, mais ça fait 13 mois que je l'écris ici: on ne revient jamais. Du moins pas à des postes pareils et après une défaite retentissante. La cruauté du regard public grossit le moindre écart, le plus petit défaut. Pour Sarkozy actuellement c'est criant. Il se trouve que l'homme vieillit un peu, son physique le marque. Il en va ainsi de tous, mais pour lui qui fut un battant, les marques infimes du temps qui passe sont comme démultipliées. Et des hésitations de détail apparaissent comme de grandes affaires. C'est magnifiquement observé ici.
Et nous voici dans un temps où il semble qu'il s'en rende compte, qu'il soupèse chaque mot là où, avant, il n'hésitait devant aucun excès. C'est un petit peu comme s'il avait rétréci. Mais il est vrai que le personnage a en lui une fragilité fondamentale. Philippe de Villiers écrit de lui, paraît-il: "Plus attiré par le Qatar que le Mont-Saint-Michel, Sarkozy ne croit pas à l'oeuvre du temps". C'est bien vu. On ne nous le vend plus en cycliste ou en joggeur accompli mais comme un petit monsieur, plus silencieux que jadis, qui s'assagit tout en continuant, paradoxalement, à éructer de temps à autres, manière de rappeler le bon temps. Son changement de comportement physique est éloquent. La calamiteuse séquence, lors d'un meeting de la partie la plus à droite catho de son électorat, où il avait publiquement fait marche arrière, devant la bronca de la salle à propos du mariage pour tous, avait été incroyablement éloquente. Et tout se passe comme si Sarko intériorisait cette difficulté qui s'accroît, prenait peur là où, avant, il aurait sauté sans crainte.
Par contraste, il semble que les prestations de Juppé soient jour après jour plus sereines, plus assurées, plus indifférentes aussi à l'adversité. Évidemment, c'est une nouvelle catastrophique pour Hollande car face à Juppé, il n'a aucune chance. Juppé aura des voix centristes qui, en 2012, se sont portées sur Hollande. Pour en rester à ces apparences parlantes, il semble d'ailleurs que Hollande, lui aussi, assume plus sereinement au physique sa position de celui qui, quoi qu'il arrive, maintiendra un cap impopulaire jusque chez les siens. Et c'est comme si, lui aussi, avait intériorisé que le mur s'élevait chaque fois davantage qui le sépare de la victoire. Et l'encaisse assez sereinement.
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