• Cet agrément de la haine

    Aux presses universitaires de RennesJe viens de lire une Histoire de la Haine de Frédéric Chauvaud qui incite à la réflexion. Au fond, nous avons un besoin secret de la haine. Détester est reposant, ça vous justifie. L'autre est si mauvais, méchant, nul, nocif. Pas besoin de réfléchir sur ses propres arguments, l'autre est au mieux un con, au pire un salaud.

    Chauvaud fait une manière de Michelin de la haine: la haine politique, la haine entre classes sociales, la haine des femmes, etc. C'est un travail universitaire, ça n'est pas un polar. Mais le recensement est intéressant.

    Demeure un fait très frappant: c'est l'immense besoin de haine. Je suis accablé, en fréquentant le net, de voir combien peu de commentaires sont favorables quel que soit le sujet. Combien même le ton monte à l'hystérie. Tel raisonnement n'est pas "contestable", mais "débile". Tel personnage est "nul", mais pas "discutable". On est à 200 à l'heure dès les premiers mots. C'est assez préoccupant. Parce que cela nous désigne une appétence du public pour la détestation qui est extrêmement peu productive.

    Cet agrément de la haineFAIBLES ENTHOUSIASMES.- Car, en sens inverse, je remarque combien sont faibles les enthousiasmes. Telle entreprise réalise une prouesse technologique? Oui mais c'est pour gagner du pognon. Tel match a vu une victoire inattendue? Bien sûr, il était truqué, etc.

    L'incapacité de la parole politique à prendre le courage de prêcher le compromis est affligeante. Lorsque chacun d'entre nous, par simple bon sens, voit combien des hommes apparemment éloignés devraient, en fait, s'entendre, la posture du refus (bien sûr le refus de la "compromission"!...) est la règle.

    Il y a des lieux du monde, la Palestine, le Pakistan, l'Ukraine où la haine a atteint une telle densité qu'elle est devenue comme solidifiée. Vous voulez gâcher une soirée? Parlez de la Palestine entre amis. J'étais frappé, l'autre jour, de lire dans le Haaretz, le grand quotidien de gauche d'Israël, une tribune de l'ancien directeur général du Mossad, le service de renseignement israélien, qui disait sereinement qu'Israël et le mouvement sioniste vont dans le mur. Alors que de lui, on eût attendu un discours brûlant de la volonté d'en découdre. Je me suis dit que cet homme avait un grand courage et probablement était un bel esprit. On ne peut pas oublier que les hommes qui sont restés dans l'histoire (Nelson Mandela et Frédérik De Klerk, De Gaulle et Adenauer) sont ceux qui avaient toutes les raisons de rester dans le registre de la haine mais qui l'ont surmontée.

     


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