• La grande carambouille pétrolière autour de DaeshPar le jeu de son mariage avec une Allaouite proche de la famille Assad, il semble bien que l'homme d'affaires syrien George Haswani (photo) joue un rôle déterminant dans les relations entre l'État Islamique, le régime syrien... et les Russes. En effet, cet homme qui possède une puissante compagnie, HESCO, opérant en Algérie et au Soudan également,  se trouve tout à la fois en relations avec des personnalités de haut rang des services de sécurité russes, avec des compagnies pétrolières russes et avec des membres du régime syrien.

    Il a débuté comme adjoint au directeur d'une raffinerie syrienne qu'il a même un temps remplacé. Puis il est parti en Russie y étudier et s'y est fait de nombreuses relations (dont une première épouse). Le fait que des raffineries sous son contrôle, dans des territoires passés entre les mains de l'Etat Islamique, continuent de fonctionner a suscité plus que des curiosités. Le problème est que ceci souligne un formidable double jeu joué dans la région. Il apparaît bien, en effet, que le régime syrien se trouve ainsi parmi les financiers de son ennemi Daesh puisqu'il en achète le pétrole.

    Le problème, dans cet imbroglio, est que le régime de Damas accuse, à son tour, le régime turc de pratiquer de la contrebande de pétrole ce qui présente un certain degré de vraisemblance. Cette accusation vient d'être abondamment relayé par les Russes. On a pu lire,  ici ou là, que le propre fils d'Erdogan serait impliqué. En tous cas, pour des raisons géographiques évidentes, il est impossible que le pétrole trafiqué n'implique pas des acteurs turcs. Jusqu'à quel niveau? C'est toute la question. La Russie vient de faire savoir qu'elle allait donner des détails sur ce point, dans le moment de tension que nous vivons entre Russes et Turcs. 

    Toute la question est de savoir le nombre de pays qui sont impliqués dans ce trafic. Car, s'agissant en tous cas de George Haswani, il apparait que sa compagnie est très ouvertement liée à des compagnies russes. Ce trafic est clairement déterminant dans la poursuite du conflit. En novembre, les Nations Unies estimaient les revenus pétroliers de Daesh entre 846,000 et $1.6 million de dollars par jour. L'Union Européenne et les États-Unis ont pris des sanctions contre Haswani, mais le niveau d'intrication de ses réseaux reste obscur. En tous cas, on comprend mieux, dans ce contexte, la touchante sollicitude des Russes pour le régime d'Assad. Et ceux qui  voient en la Syrie un rempart contre Daesh feraient bien d'y réfléchir à deux fois.


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  • Syrie: Merci Altesse, vous avez raisonLe Prince Charles vient de déclarer à Skynews que le changement climatique avait sa part de responsabilité dans la situation en Syrie. Il a totalement raison et cet aspect - parce qu'il est de long terme- a été peu vu. Trois ans avant le début des évènements, la chance m'avait été donnée de discuter avec un spécialiste des économies méditerranéennes qui l'annonçait déjà. Nous étions alors en plein printemps arabe dont on a également peu dit qu'il n'était pas sans relation avec une hausse, dans les années qui avaient précédé, du cours des céréales liée à de mauvaises récoltes, entrainant un renchérissement de la nourriture de base.

    Dans le cas de la Syrie, c'est une longue sécheresse - en fait de très longue durée, mais dense sur ces six dernières années, qui est en cause. On n'est jamais assez attentif au fait qu'une part très notable du territoire syrien est désertique ou, pour raisonner en sens inverse, que la part du territoire qui est exploitable par des paysans est mince. La sécheresse en cause l'a encore réduite. Et c'est là qu'intervient la plus basse des politiques. Tout ceci a donné du prix aux puits et aux sources. Le pouvoir en a favorisé l'accès à des membres de son parti provoquant la colère de beaucoup. D'autant plus que la seule alternative, dès lors, était le départ vers les villes, ou plutôt les bidonvilles où rien n'est prévu pour ces afflux de populations.

    En clair, le mécontentement ne s'est pas focalisé sur des idées vagues de liberté d'expression mais sur la déstabilisation sociale d'une partie de la population. Il est certes vrai que la question de la liberté d'expression est entrée en lice dès lors que ces populations marginalisées ont voulu dire leur colère. Mais le facteur de départ est bel et bien - Altesse vous avez raison- une déstabilisation de l'économie rurale.

    Par parenthèse, on ferait bien d'y regarder de près pour d'autres régions menacées du monde. Car cet exemple nous montre que les fléaux de type Daech se greffent sur les déséquilibres naissant. Pour une fois, ne battons pas notre coulpe. C'est bien le régime d'Assad qui eût du réagir et qui ne l'a pas fait parce que son petit peuple l'indiffère. Mais nous ferions bien de regarder les autres régions du monde éventuellement concernées en nous interrogeant sur les forces qui pourraient profiter, ici ou là, du déséquilibre naissant.


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  • Daech: et voilà la drogue qui s'en mêleToutes les guerres ont une connexion avec les réseaux criminels. Il est de notoriété publique qu'un certain nombre des grands conflits du XX° siècle ont, à un moment ou à un autre ont amené les parties en cause à se mettre en relation avec les grands réseaux criminels soit qu'il s'agisse de trouver des armes, soit qu'il s'agisse de trouver de l'argent. L'exemple le plus flagrant dont nous voyons, aujourd'hui encore, des prolongements est le cas de l'Irlande du Nord dont j'ai abondamment traité ici et ici.

    Or voici que surgit l'affaire du juteux trafic de captagon, amphétamine qui a le double avantage d'inhiber la peur des combattants dans le conflit syrien et de permettre de beaux profits qui, bien sûr permettent le financement des combats. Pas moins de deux tonnes des pilules de captagon ont été saisies à l'aéroport de Beyrouth lundi 26 octobre. Le prince saoudien Abdel Mohsen Ibn Walid Ibn Abdelaziz et quatre autres personnes, dans les bagages Daech: et voilà la drogue qui s'en mêledesquels on a trouvé tout cela,  comptaient se rendre à Riyad en jet privé. Côté profit, il n'y a pas photo: une pilule coûte quelques centimes de dollars au Liban et se revend plus de 20 dollars en Arabie saoudite, où près de 55 million de comprimés sont saisis chaque année.

    Côté "stimulant de combat", Daech n’est pas le seul à avoir recours à cette drogue à base d’amphétamine : sur le front militaire syrien, les membres d'Al-Nosra et les soldats de l’Armée syrienne libre (ASL) l’utilisent.  Un officier de la brigade des stupéfiants de Homs, cité par Reuters, se rappelle l'attitude surprenante des prisonniers sous l'emprise de Captagon : "On les frappait et ils ne ressentaient pas la douleur. La plupart d'entre eux rigolaient alors qu'on les bourrait de coups."

    Le conflit du Proche-orient, avec ce que cela implique d'états qui ont perdu le contrôle sur leur propre territoire est pain béni pour tous les trafics. La Syrie est devenue la plaque tournante de la production et de l’exportation du Captagon, très facile à contrefaire. Le Captagon n’est donc pas seulement une drogue de terrain. Son trafic a entraîné la naissance d’une véritable économie de guerre, selon Radwan Mortada, spécialiste des mouvements djihadistes : "Les milices en Syrie en consomment une partie mais elles l’exportent aussi vers l’étranger, notamment vers les pays du Golfe. Les gains leur permettent de financer l’achat de leurs armes et leurs opérations militaires."Ainsi, "un sac qui contient 200.000 pilules rapporte 1,2 million de dollars une fois arrivé à destination". Des bénéfices d’autant plus importants qu’il suffit seulement "de quelques milliers de dollars" pour produire une telle quantité de Captagon.

    L’Arabie saoudite est particulièrement friande de cette amphétamine : 55 millions de pilules y sont saisies chaque année. Et ces chiffres ne font qu’effleurer la réalité, puisqu’ils ne représentent que 10% des pilules en circulation dans le royaume. Est-ce pour cela que c'est un prince saoudien qui est en cause? Ou bien, celui-ci avait-il l'intention de pourvoir à des besoins des combattants en Syrie pour des raisons plus politiques? On aimerait bien le savoir. Mais, une fois encore, la situation actuelle de l'Irlande montre qu'une fois que les réseaux mafieux ont mis le pied quelque part, il est difficile de les éradiquer fut-ce plus de dix ans après la paix. 

     


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  • L'Europe ne peut pas se permettre de voir s'effondrer la TurquieCe dimanche se déroulent une nouvelle fois des élections législatives en Turquie, sorte de rebelote, après qu'un premier scrutin, avant l'été, n'ait pas donné au parti de Recep Erdogan la majorité qu'il escomptait, notamment pour aller vers un régime présidentiel. Cela ne s'est donc pas produit et il y a assez peu de chances que cela se produise ce dimanche. Les sondages, en vérité, montrent peu de changements, sauf un tout dernier vaguement suspect.. Pourtant la violence inouïe de récents attentats suicides (voir ici) et d'affrontements multiples devrait renforcer le pouvoir autoritaire en place. Mais il ne semble pas que cette logique soit à l'oeuvre. Le pouvoir le sent bien qui a eu cette extraordinaire faiblesse de dire qu'on pourrait...revoter encore bientôt, sous-entendu si le résultat ne lui donne pas satisfaction. L'attaque contre une télévision, la mainmise sur des journaux de la part du pouvoir donnent une image désastreuse de sa dérive autoritaire. Toute la question est de savoir jusqu'où peut aller le coup de force et dans quelle mesure l'opinion va réagir.

    Pour l'Europe, l'enjeu est de taille. Quel est au sud du continent l'ultime pays dont l'état tienne encore à peu près debout? Les pays des Balkans sont bien faibles, la Grèce en pleine crise. Et ce n'est pas un hasard si la chancelière allemande, Mme. Merkel, s'est récemment rendue à Ankara. Si ce verrou là saute, la crise sera immense. Je n'entends pas ici que l'échec éventuel de M. Erdogan signifierait que le verrou a sauté. La vraie question est de savoir si la Turquie est infiltrée significativement par des réseaux de l'Etat islamique. Il semble bien que la réponse soit positive. Beaucoup suggère que le dramatique attentat suicide d'Ankara qui a fait plus de cent victimes ait été organisé par Daesh.

    En vérité, peu importe, du point de vue européen qui l'emporte finalement. On peut même penser qu'une progression du parti kurde qui a réussi à fédérer autour de lui de non-kurdes aspirant à plus de démocratie serait, probablement, assez bien vu. L'arrogance de M. Erdogan finit par devenir agaçante. Ce qui importe c'est que l'état turc continue de tenir debout. Il peut se prévaloir d'une armée et de services d'ordre forts et d'une société civile dynamique. Mais enfin si les kurdes n'accèdent pas au pouvoir pacifiquement par les élections, il y a de fortes probabilités que la voie de la violence se maintiendra à un moment où la Turquie est désormais sollicitée fortement par l'État islamique (voir ici). Il faut donc à la fois un pouvoir fort et un net soutien populaire et, de préférence, un pouvoir fort parce qu'ayant un fort soutien populaire. 

    Mais ne nous racontons pas d'histoire. Ce qui compte objectivement par rapport aux menaces nouvelles c'est les forces de répression disponibles. Et que ce soit M. Erdogan ou un autre qui en dispose, égoïstement, ça ne nous émouvra guère. Ceci pointe nettement l'extraordinaire faiblesse du dispositif de défense européen face à ce type de menaces. Nous n'avons aucune capacité d'intervention et nous sommes, objectivement solidaires du pouvoir turc quel qu'il soit d'un point de vue sécuritaire. La raison nous pousse à penser qu'un pouvoir ayant une meilleure assise démocratique pourra mieux tenir - et moins craindre en particulier les ardeurs kurdes dès lors que ceux-ci participeraient au pouvoir. Mais enfin on parle beaucoup d'un éventuellement gouvernement de coalition, avec toute la fragilité que la formule peut induire. Dans une situation aussi mouvante que l'actuelle, si des pions tombent sur l'échiquier nous serons très menacés.

    L'Europe ne peut pas se permettre de voir s'effondrer la TurquiePS.- Il est légèrement douteux que l'initiative d'Erdogan de faire passer son pays à l'heure d'hiver quand il voudrait (c'est-à-dire deux semaines après les autres) lui ait valu une grande considération du corps électoral. Il paraît que le hashtag "Mais quelle heure est-il aujourd'hui a été utilisé plus de 40 000 fois en une seule journée. Recep, ne déconne pas trop avec les réseaux sociaux


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  • L'information court depuis un rapport du Fonds Monétaire International: l'Arabie Saoudite et quelques états 100% pétroliers comme le Bahrein pourraient être en faillite d'ici 5 ans. Motif: les cours du pétrole sont beaucoup trop bas pour leur permettre de continuer la politique sociale ultra-généreuse avec laquelle ils achètent la paix sociale. En effet, autant ces états sont impitoyables sur le plan des moeurs et du respect du pouvoir, autant ils subventionnent massivement - et dangereusement - leur population. C'est une des raisons qui explique la présence massive de populations immigrées (20% en Arabie Saoudite). Elles se substituent à la population nationale dans bien des fonctions, les nationaux, eux, bénéficiant de bien meilleurs traitements. Ces immigrés n'ont droit à rien et sont, dans certains cas, dans des conditions proches de l'esclavage. Comme nos analyses européennes sont terriblement centrées sur nos petites affaires, on s'alarme beaucoup de ce que les femmes n'aient, là-bas, pas le droit de conduire des voitures (manière indirecte de dénoncer un islam présent aussi chez nous), mais on ne dit rien des conditions honteuses des travailleurs migrants dans ces régions.


    Pour faire face à ses dépenses sociales massives,
    l'Arabie Saoudite a besoin d'un pétrole à 106  dollars le baril, alors qu'il se traîne actuellement à 46 dollars et, après des années d'excédent massif, le déficit budgétaire cette année pourrait être à 20% du PNB ce qui nous semble un écho du paradis mais qui, dans le contexte saoudien, est préoccupant. En effet, le pays est massivement engagé dans des dépenses militaires pour les conflits alentours. Et il ne peut se payer le luxe de réduire ses interventions pour maintenir son rang face à l'Iran. De même, il doit être très attentif, à l'intérieur, à ne pas donner matière à des protestations dont on a déjà vu des Risque de faillite pour l'Arabie Saouditeexemples et sur lesquelles peuvent se greffer des dissensions religieuses. Ce lundi un attentat a eu lieu, revendiqué par l'état islamique et il y en avait eu d'autres antérieurement. Par ailleurs, un certain nombre d'affaires concernant les moeurs de la cour (voir photo ci-dessous) agacent dans un royaume ultrarigoriste. Donc, on coupe d'ores et déjà en Arabie Saoudite. Et la vraisemblance d'une remontée des cours du pétrole, avec une Chine et un Brésil moins avides d'or noir, est faible.

    Naturellement, on est d'autant plus loin d'émeutes de la faim que le gouvernement saoudien anticipe d'ores et déjà en serrant les boulons. Cependant, pour ce faire, il réduit un certain nombre de programmes qui emploient des immigrés. Ceux-ci vont être priés sans douceur de rentrer chez eux où ils redeviendront des pauvres mais cette fois dans des pays pauvres. On pense particulièrement à l'Égypte. Et, ayant baigné dans le climat wahabite parfois pendant des années, quel sera l'état d'esprit de ces travailleurs contraints à rentrer?  Par ailleurs,  ce retour au pays risque d'aggraver la situation des nations concernées et, par contrecoup, de redonner de la vigueur à la crise migratoire dont nous parlons tant. 

    Risque de faillite pour l'Arabie SaouditeLa situation n'est pas la même pour le Qatar, le Koweit et les Émirats Arabes Unis mieux dotés quoique le Koweit à son tour vienne de lancer un signal d'alarme (photo). Mais il faut être très conscient que, plus au nord, deux pays sont en faillite économique virtuelle: l'Iraq et, évidemment, la Syrie. A supposer même, par extravagance, qu'une paix survienne dans la région demain (ce qui est totalement improbable), on serait en présence de pays immenses, très peuplés, dont les populations ont montré la propension à la rébellion et qui seraient à sec. C'est dire que tout raisonnement sur cette région du monde doit éliminer d'entrée l'éventualité qu'on y retrouve la sérénité avant des décennies.


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  • Source HaaretzLes propos purement et simplement délirants de M. Netanyahou, le premier ministre israélien, quant à la responsabilité du grand mufti de Jérusalem dans le choix de Hitler sur la "solution finale" portent une nouvelle fois gravement atteinte à la communauté juive mondiale. En effet, dans la mesure où on lui assigne - et le gouvernement israélien en premier- une manière de devoir de solidarité vis-à-vis d'Israël et de ce qui le représente, on la place dans une situation impossible face à des propos ineptes, un mensonge ÉNORME, que, du reste, des historiens juifs comme non juifs se sont empressés de ridiculiser. Les fameux propos litigieux ont été tenus devant le congrès sioniste mondial. J'imagine le moment d'intense malaise qui a du traverser l'assemblée. On ne peut pas s'empêcher de se demander dans quelle mesure il cultive cette outrance pour conserver une place sur la scène.

    Je n'ignore aucunement qu'une part significative, mais minoritaire, du monde juif est plus que réservée vis-à-vis des politiques menées en Israël. C'est pour beaucoup, du reste, dans la constitution de mouvements "non alignés", comme J Street, qui veulent conserver une liberté d'appréciation sur toute chose se déroulant en Israël. Liberté qui est du reste assez mal vécue par les Israéliens eux-mêmes: il suffit de lire les courriers de lecteurs de la presse israélienne pour y voir embrochés les juifs de l'extérieur qui seraient tous de doux rêveurs et d'affreux gauchistes.

    Mais avec ce raisonnement, je suis dans le subtil. Je catégorise et je ratiocine. La grande masse du public, elle, impressionnée, il faut bien le dire, par des manifestations un peu rapides de solidarité de certains juifs de la diaspora vis-à-vis de n'importe quelle décision du gouvernement israélien, va, dans un mouvement englobant, jeter le bébé avec l'eau du bain. "Tous pareils", va-t-on entendre. Et personne ne lira les protestations, pourtant unanimes de la presse israélienne. 

    Netanyahou est le pire ennemi de la communauté juiveCe qu'il y a de terrible dans l'affaire est que Netanyahou c'est qu'il ruine complètement la crédibilité de sa propre parole et, accessoirement, celle du pouvoir à Tel Aviv. Imaginons que demain, il dise quelque chose d'absolument raisonnable sur sa politique, plus personne ne voudra seulement l'écouter. En dehors du fait que sa propre politique est contestée par des manifestations sur place, je devine bien que ce genre d'esclandre ne peut qu'accroître un pénible sentiment d'isolement dans la population. Diana Pinto (photo) dans un excellent livre, "Israël a déménagé", rendait bien compte de ce sentiment de malaise, même si c'était sous un angle singulier. Accessoirement, si j'ose dire, ce lamentable épisode va accentuer la défiance généralisée du public vis-à-vis des dirigeants de premier plan et de leur parole. Je signalais récemment ce qu'il en était de Bush et Blair dont les mensonges sur la guerre en Irak sont définitivement établis.

    Et pendant que Bibi fait tout se vacarme, une information passe complètement inaperçue. L'autorité chargée de conseiller le gouvernement israélien en matière nucléaire, s'opposant frontalement à lui, trouve l'accord sur le nucléaire pertinent et garantissant que les Iraniens ne basculeront pas dans le nucléaire militaire

    Netanyahou est le pire ennemi de la communauté juivePour conclure en revenant à notre affaire, il est un peu pénible dans un même ordre d'idées de voir ce petit jeu contemporain à franchir les lignes sans arrêt. Qu'Éric Zemmour, qui se définit lui-même comme "juif d'origine berbère", ait osé écrire que Pétain avait protégé les juifs français ce qui a contraint Robert Paxton à remettre les points sur les i, est consternant. Dans mon petit pays, un peu à l'écart, où on en a tant cachés, on n'a pas beaucoup apprécié. Je suggère à ce bruyant connard radiophonique de lire Persécutions et entraides dans la France occupée, de Jacques Sémelin, qui à la fois lui remettra les idées à l'endroit et est un bel hommage à ceux qui, eux, ont protégé des juifs.

    P.S.: Je note, ce jeudi, une manifestation de mouvements juifs protester contre la manière dont l'AFP rendrait compte du conflit israélo-palestinien. Classique manoeuvre d'intimidation dont on voit des usages dans toutes les parties à tous les conflits.


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  • L'intervention russe aux côtés des forces syriennes tant par des bombardements que par des engagements au sol est un piège pour la Russie dont elle risque de payer un prix considérable. D'abord parce qu'elle fait formidablement le jeu de son adversaire supposé, Daesh, même s'il semble bien qu'elle frappe largement l'Armée Syrienne Libre. En effet, comment ne pas voir qu'elle offre aux islamistes radicaux l'image d'une croisade entreprise largement pour ses propres intérêts? 

    C'est exactement ce que Daesh souhaitait. Il semble même que des popes orthodoxes aient été assez sots pour bénir des combattants au départ et, en tous cas, des photos bidons circulent sur le net où l'on voit des soldats russes sur des chars brandissant une croix orthodoxe. Il semble que la photo ait été prise dans le Caucase et que des esprits "bien intentionnés" se soient occupés de faire croire que c'était en Syrie. Quoi qu'il en soit, le mal est fait: le régime LAÏC honni de Assad apparaît comme soutenu par des troupes chrétiennes - et qu'elles soient orthodoxes n'y change rien. 

    Source: L'OpinionLe gros problème de la guerre est qu'elle coûte affreusement cher. Une estimation sur l'engagement russe se monte à 4 millions de dollars par jour: une paille. Petit rappel: lorsque nos avions sont intervenus en Lybie nos supposés alliés américains nous ont VENDU les bombes qu'ils larguaient. On a bien vu ultérieurement, par les protestations de l'état-major français, qu'il y a un vrai problème sérieux de l'état des finances de l'armée française. Alors que dire de la Russie, pays en déclin, qui souffre horriblement de la chute des cours du pétrole, et dont la population diminue drastiquement? Si on pouvait encore croire, comme on a tant tenté de nous le faire admettre au fil des décennies, que l'affaire serait pliée en deux mois, on pourrait saluer l'initiative russe et regretter l'absence d'engagement aussi important des puissances occidentales. Mais c'est le contraire qui est vrai. Les nations parties au conflit sont engagées pour des années. Curieusement, la Russie n'a tenu aucun compte de l'expérience afghane où, jadis, l'URSS s'est enlisée. Souvenons-nous de l'immensité du malaise que cela avait provoqué dans la population alors soviétique, au point de précipiter la chute du régime. Poutine a vraiment toutes les audaces. Par ailleurs, on serait prêt à parier que le risque d'attentats en sol russe vient d'augmenter considérablement.

    Nous vivons tous, malheureusement, dans l'illusion que tout se règle sur le court terme. C'est faux en toute matière mais particulièrement dans celle-ci. J'entends périodiquement des débats qui font remonter la cause de la situation aux accords Sykes- Picot, à l'issue de la première guerre mondiale. Ca n'est naturellement pas faux, mais c'est aussi vrai que de dire que les problèmes de Volkswagen remontent à l'invention du moteur diesel. L'espoir d'un équilibre au Proche-Orient ne peut être reporté qu'à vingt ans, au terme de souffrances terribles. Je redis ce que j'ai déjà écrit: Songeons que la Syrie a déjà vu partir un sixième de sa population, plus de quatre millions de personnes. On voit bien que le soin désormais des grandes puissances de se tenir à prudente distance d'engagements trop nets tient précisément à ce qu'elles on parfaitement fait ce diagnostic. Et ce qui les embête le plus profondément dans la crise des migrants est qu'elle risque de les contraindre à changer de position. De ce point de vue, on peut presque écrire que provoquer une monstrueuse vague migratoire est une tactique redoutable de Daech. Sauf que je ne suis pas tout à fait sûr que ce soit à ce point pensé.


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