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Les catholiques instrumentalisés par les partis de la haine
En France, c'est du côté de la Manif pour Tous qu'il faut regarder et de Marion Maréchal-Le Pen. En Pologne, c'est du côté du nouveau gouvernement qui a procédé à la prestation de serment à genoux. Un mouvement qui peut avoir des aspects violents est en train de s'emparer du catholicisme pour en faire un mouvement revanchard, sans aucun rapport avec ses fondements doctrinaux véritables. Car ceux dont nous parlons ont de violentes quintes de toux lorsqu'on leur parle du pape François, sans rien dire, bien sûr, de tout ce qui peut être attention à l'Autre dans la doctrine de l'Église. En revanche, un petit fumet d'antisémitisme, là...
Il faut voir d'où cela vient car tout le monde en prend pour son grade. Au milieu des années cinquante, Jean Ousset (photo) crée la Cité Catholique qui a en détestation toute forme de modernisme et particulièrement de libéralisme. Au passage, ceci rend comique le fait que des ultra-libéraux contemporains, façon Mariton, flirtent avec le mouvement. Celui-ci va trouver un réel succès dans la proximité des officiers humiliés par les échecs successifs en Indochine puis en Algérie. Il n'est pas sûr que, sur le coup, on ait bien mesuré les aigreurs qui naissaient alors.
Pour tout ce monde, la France véritable ne peut être que catholique et assurément pas républicaine. Cela va être répandu dans d'innombrables séminaires et colloques, soutenus par des religieux, disciples, notamment d'un prêtre d'origine espagnole, François de Paule Vallet. Il est né en Espagne, a longuement séjourné en Amérique Latine, puis s'est installé à Chabeuil (Drôme) où, sur le modèle de Saint Ignace de Loyola, il institue des "Exercices spirituels" et crée les coopérateurs paroissiaux du Christ Roi. Dans une atmosphère d'exaltation ultra-réactionnaire, le mouvement s'étend, déborde ultérieurement en Suisse, où j'ai eu à rencontrer des témoins qui me parlaient des déséquilibres psychiques - façon secte- de certains des partisans du mouvement.
Des décennies durant, dans un sentiment d'hostilité alentour de la part d'un monde qui affichait une détestation un peu moqueuse du catholicisme, des milieux étroits vont survivre. On paie là, à prix élevé, un anti-catholicisme par dérision qui a fini par blesser beaucoup. Ici ou là, ils trouvaient des relais. Quelques milieux d'extrême droite, comme Patrick Buisson, un temps conseiller de Sarkozy, leur offraient de timides relais. Aujourd'hui c'est tout autre chose: la manif pour tous, via Civitas, est l'émanation de ces groupuscules. Et on a changé d'échelle. Un certains nombre de leurs membres ont pu s'infiltrer dans les candidats Les Républicains aux élections régionales. Des parlementaires, pourtant non catholiques comme Hervé Mariton , ont servi de relais. C'est la revanche des bien-pensants.
A présent, Marion Maréchal Le Pen devient un relais qui a accès au journal de 20 heures. Et, pour le cas où l'on croirait que tout cela n'est que de la petite bière, je suggère fortement d'aller voir (ici) ce qui advient en Pologne lorsqu'un catholicisme hystérique revient au pouvoir. Je redis fortement ici que ceci n'a aucun rapport avec l'immense masse des catholiques, a fortiori pas avec la papauté actuelle. Le problème est qu'il suffit que l'on revendique avec force décibels pour qu'on soit cru.
Les prochaines élections régionales, par exemple à travers un Laurent Wauquiez peu éloigné de ces milieux, vont leur donner des moyens de faire un entrisme encore plus fort. Tout ceci démontre qu'il faut prendre l'histoire au sérieux et cesser de croire que le monde est né il y a quarante-huit heures. Par ailleurs, on serait tout-à-fait intéressé de connaître la vraie nature des liens internationaux de ces mouvements. Par exemple, Civitas qui se revendique explicitement de la filiation de Jean Ousset est mené par un militant d'extrême-droite belge, Alain Escada. On aimerait bien connaître les autres connexions. Avec la Pologne?
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