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Réfugiés: Petite histoire d'un embarras extrême
Le flot de réfugiés qui nous parvient et l'accueil très remarquable que les opinions publiques ont manifesté à leur égard ont contraint un bon nombre de politiques à des pirouettes tout à fait amusantes. La plus ahurissante est celle de Cameron qui se met probablement dans un mauvais cas. En l'espace de 24 heures, comme l'on sait, il a subitement déclaré qu'il était prêt à être beaucoup plus généreux dans l'accueil, en totale contradiction avec ce qu'il disait quelques heures plus tôt. Comme tous les autres, il s'est fait piéger par l'attitude de très grande ouverture de Merkel qui aurait du être une de ses alliées. Or, pour lui, les choses sont très graves. Comme l'on sait, il se feint promoteur d'un proche référendum sur l'appartenance de la Grande-Bretagne à l'Europe. En vérité, il est hautement probable que, dans son for intérieur, il n'a aucune envie de quitter l'Europe, mais il espère qu'en prenant cette attitude jusqu'au boutiste, il obtiendra de larges concessions de Bruxelles. Du reste, on les voyait venir. Mais pour cela, il lui faut avoir Merkel dans son sac. Or, la chancelière allemande a tellement pris ses homologues en contre pied qu'on assiste à de l'équilibrisme comique. Il est hautement probable que pour Cameron, la négociation avec ses partenaires va devenir plus tendue avec, pour lui, un lourd enjeu de politique intérieure. Au passage, ne mésestimons pas dans l'affaire l'enjeu de leadership européen qu'elle comporte.
En France, on s'amusera de Ciotti qui, en quelques jours, a diffusé des tweets en sens radicalement inverse, mais on est là dans les seconds rôles. Le spectacle des Républicains, condamnés - à nouveau par difficulté à apparaître en contradiction avec une vieille alliée conservatrice, Angela Merkel- à des propos vaguement techniques sur le sujet pour éviter d'être trop tranchants, a un petit côté réjouissant.
Certes, le ralliement de Juppé et Raffarin à l'éventualité d'une opération militaire en Syrie confirme dans le sentiment qu'on est là en présence d'une droite qui ne va pas jusqu'à l'hystérie, ce qui est infiniment reposant. Mais pour la droite plus globalement, la situation est très inconfortable. Personne ne comprendrait que ses chefs s'affichent contre Merkel qu'ils citent à tout bout de champ sur d'autres dossiers. La logique pousserait pourtant les Républicains à concurrencer Marine Le Pen, mais, dans les heures que nous vivons, un peu de morale, tout de même, ne fait pas de mal.
Et voilà enfin ce pape François, décidément épatant, qui va accroître l'embarras général en incitant chaque paroisse à recevoir des réfugiés. On imagine comment vont le digérer tous ceux, de plus en plus nombreux, qui se réclament bruyamment d'un catholicisme de reconquête et qui ne sont pas loin dans les couloirs de l'opposition française.
Je dois dire que la position du groupe de Viesgrad regroupant, Pologne, Hongrie, république tchèque et Slovaquie pour affirmer qu'ils ne veulent pas entendre parler des quotas est un peu forte de café. Car enfin les Hongrois ont été formidablement reçus en 1956, comme le rappelle justement la presse suisse, et les Polonais n'ont pas été les derniers à provoquer de forts mouvements migratoires dans le passé. Par ailleurs, les uns comme les autres ont été inondés de crédits bruxellois. Franchement, un peu de reconnaissance...
Ceci dit, une jolie tribune du New York Times dit la honte ressentie face au nombre dérisoire (1200) de réfugiés syriens reçus aux États-Unis ou au Canada. Oui, il y a de quoi.
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