• Sueurs froides chez les travaillistes


    Il se passe en Grande-Bretagne quelque chose de très emblématique des temps que nous vivons.
    Il va falloir élire un nouveau leader au parti travailliste qui a subi une monstrueuse déculottée aux dernières élections législatives. Il se trouve que cavale très nettement en tête des sondages un dénommé Jeremy Corbyn que l'on situerait chez nous "à gauche de la gauche". Il a 17 points d'avance dans les sondages. 

    Panique dans l'establishment travailliste où l'on a mobilisé, notamment, tous les anciens premiers ministres pour dire le danger. Le problème est que cela a, très probablement, l'effet inverse de celui désiré: les électeurs travaillistes ne veulent absolument plus de ce genre de profils. Mais, étant donnée la nette avance de Corbyn, se pose la question de savoir si les autres candidats continueraient à servir le parti, en cas de victoire de Corbyn. Cette vidéo est éloquente (même si je dois constater que sa diffusion est médiocre).

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    On remarquera, dans cette vidéo, la réaction indignée d'une des interlocutrice à l'idée que le parti travailliste devienne un simple parti protestataire. Elle ne le dit pas, mais on le comprend: le Labour est fait pour aller au pouvoir. La volonté des adhérents, Mon Dieu, c'est intéressant, mais enfin... Comment ne pas penser à ce que nous vivons en France?

     Face à l'incontestable succès de cette voie différente, on utilise de petites saloperies comme celle qui consiste à suggérer que, parce qu'il a soutenu un comité de commémoration du massacre des Arabes à Deir Yassin, en Palestine,  en 1948 (évènement qui n'est plus contesté par personne) et qu'un des membres de ce comité est devenu négationniste de l'holocauste, Jeremy Corbyn en deviendrait suspect à son tour. Voici une interview agressive de Channel Four qui montre à la fois la vigueur de la campagne contre lui et, en même temps, que le journalistes lorsqu'ils veulent une réponse en Grande-Bretagne l'obtiennent. Ce qui n'est pas plus mal.

    En vérité, on est là en présence de ces surgissements très significatifs dans la vie de nos grandes nations: la demande d'autres voies et d'autres voix que j'avais déjà notée ici. C'est malheureux à dire, mais en mettant dans le discours public - pour s'y opposer- le terme d'"établissement" (par allusion à l'"establishment" anglais), le Front National voyait juste. Du reste, des mouvances fort éloignées et qui le combattent ont repris la formule ou se sont présentées comme "anti-système" ce qui veut dire la même chose. 

    Je m'amuse de plusieurs choses: D'abord, comme pratiquement toujours, les anti-systèmes sont très forts pour utiliser les médias du système qui, eux-mêmes, courent toujours derrière le dernier cheval, trouvant du reste, une jubilation masochiste à se faire traiter de salauds. Je ne suis pas sûr que Corbyn ait toujours des idées de génie, par exemple, lorsque, pour préserver les femmes des agressions sexuelles dans les transports publics, il propose des wagons différenciés par sexe.

    Mais peu importe. Corbyn ne m'intéresse pas: je n'ai pas assez de données sur les demandes du public britannique. C'est bien davantage le symptôme qui est intéressant: l'usure d'un discours trop lisse, trop convenu.  On dit que les politiques sont toujours les mêmes. Je le crois moins que le sentiment d'une impuissance du monde politique, impuissance dont il faut dire qu'elle vient des générations antérieures. Nos actuels dirigeants ont hérité des abandons de leurs prédécesseurs. On avait cru, avec Syriza, que pourrait se mettre en place un pouvoir qui ferait marche arrière. On vient de voir que non.

    N'ayant pas, moi-même, la science infuse, je me méfie de ceux qui affirment l'avoir. Je me demande au nom de quoi. Pour cette raison, je ne sais pas si l'on peut faire marche arrière. Je ne peux que constater l'immense demande de ce retour en arrière, vers un temps où l'on maîtrisait les choses. On voit bien, par exemple, que le "souverainisme" est la forme contemporaine de cette demande de ce retour en arrière.

    Quoi qu'il en soit dans cette vieille nation avec une reine désuète aux couvre-chefs terrifiants, voilà qu'apparaît aussi, fort bien placé un hétérodoxe intégral. C'est un signe des temps.


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