• Le grand chamboulement qui s'annonce

    Petite prospective. Imaginons que Macron emporte la présidentielle, ce qui est aujourd'hui l'hypothèse la plus probable. Cela conduira à un bordel inouï au PS dont une part acceptera de le rejoindre. Pour cette raison, elle s'attirera la haine de l'autre part et celle, acquise de longue date, des mélenchonniens. Mais ce noyau de la gauche dure devra bien constater lui-même qu'il ne l'a pas emporté en raison de l'incapacité de Hamon et Mélenchon de s'unir. Bordel inouï là encore. Mais à droite, on sera sur un champ de bataille façon Waterloo car les nombreuses écuries qui la composent seront dans une rancoeur inouïe de la responsabilité de Fillon. Ceci nous promet des années de guerres internes. Enfin, à l'extrême droite, Marine Le Pen, malgré toutes ses fluctuations et ses ajustements, ne sera pas passée. C'est bien le culte du chef mais à condition qu'il amène des victoires. Or cet échec là sera dur à digérer.

    Imaginons maintenant que, par un miracle dont on voit mal comment il pourrait se produire, soit Fillon, soit un plan B l'emporte.Le souvenir des trahisons lors du terrible épisode de l'affaire actuelle va fragiliser durablement les équipes au pouvoir. Plus d'élan façon Sarko- 2007, mais des comptes à régler en interne. Donc un pouvoir faible et, probablement, une majorité instable à l'assemblée. Sombres jours à l'horizon.

    Imaginons enfin que Hamon réussisse avec un soutien conditionné de Mélenchon: on peut parier sur une immense rancoeur de Mélenchon précisément qui n'aura décidément jamais réussi une victoire personnelle et n'aura obtenu qu'un accessit. Or, quoi qu'il raconte à ses ouailles, Mélenchon est dans une démarche extraordinairement personnelle, souvenons-nous des conditions de l'annonce de sa candidature. Par ailleurs, les nouveaux vainqueurs auront naturellement envie de faire la peau à ceux de leurs petits camarades qui auront fait le choix de Macron. Ambiance... et climat pourri.

    Donc, on ne va pas vers les beaux jours.

    Ce qui est frappant dans la percée de Macron est qu'il cristallise sur son nom une réalité très profonde du pays dont la quasi-totalité des commentateurs refusent de parler parce que ça n'est pas politiquement correct: c'est l'existence d'un centre, et particulièrement d'un centre gauche, déterminant lors des élections malgré le mépris dont il est l'objet. Macron a synthétisé ça dans sa formule "ni gauche, ni droite", qui est, classiquement, insupportable à un grand nombre de belles consciences.

    Deux remarques à cet égard: il y a 36 000 communes en France, dont un peu moins de 30 000 sont gouvernées, par le jeu du mode de scrutin, dans des alliances de contraires, donc un "ni droite ni gauche". Or ça marche. Peut-être pas sans tension, mais globalement c'est un bon système qui oblige à la collaboration. Et ça, les Français le savent parce qu'ils peuvent le voir tous les jours. Donc pour eux, le "ni droite ni gauche" a une consistance, une matérialité. 

    Deuxième remarque: le nombre de structures (et tout particulièrement les entreprises, surtout les petites), où, pour avancer, le compromis est indispensable et permanent est non seulement majoritaire, mais totalement dominant. Or c'est une forme de "ni droite ni gauche". Ca ne signifie pas l'amour. Ca n'exclut pas les conflits, parfois graves, mais globalement ça marche. Cela chacun le sait.

    Aussi lorsque tout le discours construit sur la scène politique est, tout au contraire, celui d'oppositions radicales, violentes, les Français ne comprennent pas. Ca ne ressemble pas à leur vie. C'est le coeur de l'affaire aujourd'hui: le corps électoral n'en peut plus d'une scénarisation si éloignée de ce que montrent les vies quotidiennes. Aussi, souvenons nous d'un exemple totalement oublié, celui de l'Italie. Dans les années quatre-vingt, alors que les socialistes et les démocrates chrétiens se partageaient le pouvoir depuis quarante ans, s'opposant dans des querelles convenues, les Italiens en ont eu raz le bol. Et tous les partis classiques ont disparu aux élections législatives. Ca nous pend au nez.

     


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