• L'Europe ne peut pas se permettre de voir s'effondrer la Turquie

    L'Europe ne peut pas se permettre de voir s'effondrer la TurquieCe dimanche se déroulent une nouvelle fois des élections législatives en Turquie, sorte de rebelote, après qu'un premier scrutin, avant l'été, n'ait pas donné au parti de Recep Erdogan la majorité qu'il escomptait, notamment pour aller vers un régime présidentiel. Cela ne s'est donc pas produit et il y a assez peu de chances que cela se produise ce dimanche. Les sondages, en vérité, montrent peu de changements, sauf un tout dernier vaguement suspect.. Pourtant la violence inouïe de récents attentats suicides (voir ici) et d'affrontements multiples devrait renforcer le pouvoir autoritaire en place. Mais il ne semble pas que cette logique soit à l'oeuvre. Le pouvoir le sent bien qui a eu cette extraordinaire faiblesse de dire qu'on pourrait...revoter encore bientôt, sous-entendu si le résultat ne lui donne pas satisfaction. L'attaque contre une télévision, la mainmise sur des journaux de la part du pouvoir donnent une image désastreuse de sa dérive autoritaire. Toute la question est de savoir jusqu'où peut aller le coup de force et dans quelle mesure l'opinion va réagir.

    Pour l'Europe, l'enjeu est de taille. Quel est au sud du continent l'ultime pays dont l'état tienne encore à peu près debout? Les pays des Balkans sont bien faibles, la Grèce en pleine crise. Et ce n'est pas un hasard si la chancelière allemande, Mme. Merkel, s'est récemment rendue à Ankara. Si ce verrou là saute, la crise sera immense. Je n'entends pas ici que l'échec éventuel de M. Erdogan signifierait que le verrou a sauté. La vraie question est de savoir si la Turquie est infiltrée significativement par des réseaux de l'Etat islamique. Il semble bien que la réponse soit positive. Beaucoup suggère que le dramatique attentat suicide d'Ankara qui a fait plus de cent victimes ait été organisé par Daesh.

    En vérité, peu importe, du point de vue européen qui l'emporte finalement. On peut même penser qu'une progression du parti kurde qui a réussi à fédérer autour de lui de non-kurdes aspirant à plus de démocratie serait, probablement, assez bien vu. L'arrogance de M. Erdogan finit par devenir agaçante. Ce qui importe c'est que l'état turc continue de tenir debout. Il peut se prévaloir d'une armée et de services d'ordre forts et d'une société civile dynamique. Mais enfin si les kurdes n'accèdent pas au pouvoir pacifiquement par les élections, il y a de fortes probabilités que la voie de la violence se maintiendra à un moment où la Turquie est désormais sollicitée fortement par l'État islamique (voir ici). Il faut donc à la fois un pouvoir fort et un net soutien populaire et, de préférence, un pouvoir fort parce qu'ayant un fort soutien populaire. 

    Mais ne nous racontons pas d'histoire. Ce qui compte objectivement par rapport aux menaces nouvelles c'est les forces de répression disponibles. Et que ce soit M. Erdogan ou un autre qui en dispose, égoïstement, ça ne nous émouvra guère. Ceci pointe nettement l'extraordinaire faiblesse du dispositif de défense européen face à ce type de menaces. Nous n'avons aucune capacité d'intervention et nous sommes, objectivement solidaires du pouvoir turc quel qu'il soit d'un point de vue sécuritaire. La raison nous pousse à penser qu'un pouvoir ayant une meilleure assise démocratique pourra mieux tenir - et moins craindre en particulier les ardeurs kurdes dès lors que ceux-ci participeraient au pouvoir. Mais enfin on parle beaucoup d'un éventuellement gouvernement de coalition, avec toute la fragilité que la formule peut induire. Dans une situation aussi mouvante que l'actuelle, si des pions tombent sur l'échiquier nous serons très menacés.

    L'Europe ne peut pas se permettre de voir s'effondrer la TurquiePS.- Il est légèrement douteux que l'initiative d'Erdogan de faire passer son pays à l'heure d'hiver quand il voudrait (c'est-à-dire deux semaines après les autres) lui ait valu une grande considération du corps électoral. Il paraît que le hashtag "Mais quelle heure est-il aujourd'hui a été utilisé plus de 40 000 fois en une seule journée. Recep, ne déconne pas trop avec les réseaux sociaux


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