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LE CADEAU SPLENDIDE ET EMPOISONNÉ DE LA FRANCE À ELLE-MÊME
Ils furent là par millions. Dignes, tranquilles, forts. Et cela malgré les peine-à-jouir qui rechignaient à participer à cette grande marche que la France offrait à ce qu'elle est. Les chefs d'Etat furent sobres, Hollande magnifique en particulier dans son attitude avec les familles des victimes (et j'emmerde ceux qui diront que c'est de la récupération: la moindre des choses est qu'un président console des proches de victimes innocentes). Il y a eu toutes les autres villes: Lyon, par exemple qui a approché, en nombre de manifestants, la population même de la ville. On pourrait bien être proches de 4 millions de manifestants à l'échelle du pays, voire au delà.
On se réveille tout étonné: "nous avons pu faire cela, nous"? Nous qui râlons, nous qui adorons les divisions, les polémiques, les chicaneries. Nous avons dit, ensemble, que la France était un tout. Nous avons roulé dans la farine les rentiers des petites haines. Ceux qui les fabriquent puis en tirent les bénéfices. Ceux qui les fabriquent pour en tirer les bénéfices.
Mais voilà: de cet élan magnifique, il faut faire quelque chose. On sent immensément cette demande de la part de ceux qui, croisant un reporter, lâchent quelques mots. Nous avons su, quelques heures durant, calmer nos récriminations mais combien de temps allons-nous tenir? On se sent à cet égard sur le fil du rasoir. Soit,l'on tombe d'un côté, vers le renouveau, soit l'on tombe de l'autre, vers la médiocrité. Car c'est en chacun de nous que l'effort doit se faire. Nous avons tous une part de responsabilité dans ce goût de la chicane, de la division. Les cortèges n'étaient pas encore partis qu'on pouvait déjà voir resurgir, sur les réseaux sociaux, les petits poisons des combinards de la haine. Qu'est-ce qui peut fédérer ces forces si incroyablement composites? Qu'est-ce qui peut le faire à l'échelle de l'Europe, comme le fit justement remarquer, dans un entretien plein de hauteur de vue, Matéo Renzi, le Premier ministre italien.
C'EST TÉNU.- "Je suis Charlie" peut-il être un mouvement? Y-a-t-il des formes nouvelles qui préserveraient cette fragilité de cristal. Chacun a bien vu le rôle considérable des réseaux sociaux. On s'y est engueulé, parfois insulté, mais enfin, il y avait un lien. C'est ténu, ne nous racontons pas d'histoires. Mais il y a par exemple cet attachement à la liberté de la presse inattendu lorsqu'à longueur de colonnes et de propos publics, on dit pis que pendre des médias.
Que faire, donc? Les forces centralisées - les partis, les syndicats- se sont effondrés. Donc, il y a nécessité de nouvelles échelles de structuration. Il y a nécessité d'humilité, de sortir de la théâtralité de la vie politique. J'ai dit bien des fois que je ne comprenais pas l'écart existant entre la pratique de gouvernement des petites localités - les municipalités villageoises- où, globalement, tout se passe plutôt bien et le théâtre national où sont mise en scène les ambitions d'une camarilla. Je ne sais comment il faut faire, mais il faut mettre fin à cela pour que ce peuple que nous venons de voir prenant les choses en mains, impose de nouveaux modes opératoires.
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Commentaires
2Madeleine MelquiondDimanche 11 Janvier 2015 à 20:21Oui, c'est ténu.
Mais quel magnifique encouragement !
Bref, pour une fois je ne l'ouvre pas, mais ça viendra, sois-en certain.
Madeleine
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j'adhère complètement à cette question