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Notre seul candidat à la présidentielle, Marcel Barbu
En ces temps où l'on ne pense visiblement qu'à la future campagne pour les élections présidentielles, il est juste de rappeler un des habitants de notre région qui fut candidat: Marcel Barbu, engagé dans la compétition en 1965 et dont le général de Gaulle triompha aisément puisque le « brave couillon », comme disait le général, n'aura que 1,15% des voix.
Si Marcel Barbu n'était pas originaire de notre région puisqu'il est né à Nanterre puis installé à Besançon, il le fut intensément. Il s'installa en effet à Combovin où se retrouvèrent autour de lui des réfractaires au STO et des juifs. Il avait à la déclaration de guerre transféré à Valence depuis Besançon son entreprise de fabrication de boîtiers de montres prospère. Elle va prendre le nom de Communauté de Travail Boimondau (Boitiers de Montres du Dauphiné). Et elle sera partiellement une couverture pour les réfractaires qui y travaillent, d'abord à Valence puis à Combovin. Si le nom est étrange, c'est que Marcel Barbu est un homme singulier, profondément marqué par des idées spiritualistes. “L’entreprise capitaliste est un centre de production. La communauté de travail est un centre de vie totale : spirituelle, intellectuelle, sociale, politique, économique, professionnelle”, estime-t-il. C'est ainsi qu'il veut une entreprise appartenant à tous, n'ayant pas que des objectifs économiques, où l'autorité est partagée (on se croirait au Crestois). Autour de son entreprise s'amalgameront tout un ensemble d'activités sociales (garderies, etc...)
DEPORTE.- Très engagé dans la résistance, il sera arrêté deux fois, une fois à Paris ce qui lui vaudra de faire de la prison, puis, rapidement relâché, il vient s'installer à Combovin, dans une ferme où il développe ses idées Mais les Allemands finiront par l'investir et la détruire. Ils le déporteront.
Devenu député de la Drôme après guerre, parce qu'il était suppléant d'un élu qui avait choisi de démissionner, il défendra devant l'assemblée l'idée des communautés de travail à l'image de celle de Boimondau. Ces idées, teintées de christianisme social, laisseront les autres parlementaires de marbre. Dans l'intervalle, son bras droit, ou plutôt son bras gauche Marcel Mermoz proche du parti communiste s'éloigne de lui. Au demeurant, la fabrication de boîtiers de montres à Valence durera jusqu'en 1971. Lui retournera, dans la région parisienne à une autre forme de combat: celui du logement social.
Marcel Barbu va retrouver son heure de gloire lors de l'élection présidentielle de 1965 et en particulier lors d'une intervention télévisée dans le cadre de la campagne officielle où il est pris d'un sanglot. Il vient alors de dire: « Je ne suis le cheval de retour d'aucune république, moi. Je ne suis que le Français moyen avec lequel vous avez combattu dans la Grande guerre, sauvé l'honneur du pays en 1940 (...) Le peuple a cru qu'il allait être aimé et vous avez déçu ce rêve. (…) Ce serait un grand malheur pour la France et les Français de vous voir revivre la fin du maréchal Pétain, nous n'en sommes pas encore remis ».
Voici ce qu'écrit François Caviglioli dans Combat après ce mémorable passage à la télévision. « M. Marcel Barbu porte sur le devant de la scène politique le grand combat contre les « Ils ». Les « Ils » sont partout. Ils empruntent les déguisement les plus divers. Ils vous suivent dans la rue, lisent votre courrier. Ils rudoient l'employé de mairie, la concierge, le contractuel, le receveur d'autobus. (…) Ils sont très habiles. Ils vous cernent, vous oppressent. Ils font disparaître votre poubelle, ils persuadent les chiens d'aller souiller votre paillasson (…) Mais M. Marcel Barbu est là pour vous défendre (…) Le Grand Parti des Persécutés va s'unir. La Constitution de la V° République a ouvert les profondeurs psychiatriques de la France ».
Un habillage en règle comme on peut voir. Bien d'autres journaux seront aussi cruels et Marcel Barbu quitterai la scène politique à la même vitesse qu'il l'avait investi. Mais ses idées de communauté de travail ont continué à avoir assez longtemps des adeptes. Marcel Barbu est mort en 1984.
EN PUBLIANT CE TEXTE, J'OFFRE GRATUITEMENT UN ÉLÉMENT DES ARCHIVES DU CRESTOIS. MAINTENONS DANS NOTRE RÉGION UN JOURNAL INDÉPENDANT QUI NOUS SOUTIENT.
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Commentaires
Bonjour,
Merci Jacques,
Marcel Barbu, la communauté Boimondau, on en parle encore, tous les ans un ouvrage, un article font référence à cette grande idée de "Communauté de travail" et l’engagement de Marcel Barbu dans la Résistance en Drôme : c'est un grand bonhomme ! (Qui lui n'a pas écrit ses mémoires...)
Le dernier ouvrage, qui sort actuellement "les compagnons de France du Valentinois - 1940-1944" puise aussi des informations dans le Crestois de l'époque. La préface est de Robert Serre.