• L'Irlande du Nord à nouveau à feu et à sangTrois mois après l'assassinat d'un ancien militant de l'IRA militaire, Joc Davison,  un autre vient d'être assassiné: Kevin Mc Guigan. Ceci a entraîné la démission du premier ministre protestant d'Irlande du Nord qui semble estimer que les conditions d'une cohabitation avec le Sinn Fein, catholique, n'est plus possible.


    Le fond de l'affaire est compliqué ... et a été fort bien raconté par Stuart Neville
    , un auteur de polar, dont je recommande tout ce qu'il a écrit sur l'Irlande du Nord. Il semble que quelques anciens de l'IRA paramilitaire, constatant la prolifération de réseaux de dealers de drogue (ce que raconte Neville), probablement parmi leurs anciens membres, aient décidé de mettre de l'ordre. C'est à dire qu'ils ont reconstitué un drôle de réseau - Action Against Drugs- qui flingue les dealers. Le réseau remonte haut parmi les anciens paramilitaires catholiques irlandais puisqu'on vient de voir interrogés (et libérés) parmi les plus hauts membres du Sinn Fein (ex IRA).

    Le fait que l'affaire remonte si haut et provoque d'aussi considérables troubles politiques montre à quel degré l'Irlande du Nord peine à retrouver son équilibre, ce qui tend à prouver que l'histoire, surtout si elle est violente, dure longtemps. Ceci dit ce qui est assez intéressant c'est que, pour une fois, il ne semble pas que ce soient des contre-coups politiques au sens strict, comme on l'a vu lorsqu'eurent lieu des liquidations d'anciens traîtres du combat para-militaire: Sorj Chalandon l'a fort bien raconté dans son terrible Retour à Killybegs. (J'en avais parlé ici). Là, il semble que ce soient des "anciens combattants" qui ne supportent pas de voir leurs anciens camarades donner, par le trafic de drogue, une image aussi désastreuse de ce qu'ils furent. Mais enfin si, en plus les justiciers se flinguent entre eux, ça devient trop compliqué pour moi... et pour le Premier ministre d'Irlande du Nord.

    L'Irlande du Nord à nouveau à feu et à sang

     


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  • Lutte contre le tabagisme: les effets pervers d'une bonne mesureOn m'assure que d'anonymiser des paquets de tabac va diminuer la consommation. Je ne comprends pas très bien pourquoi, mais mettons. Les sénateurs avaient proposé une solution moins radicale, prenant en compte la situation des buralistes des zones rurales qui sont en situation difficile.

    On pourrait voir là derrière un argument spécieux. En réalité, il met au jour une réalité complexe qu'il faut regarder à deux fois. Il se trouve, en effet, que les marchands de tabac sont très rarement uniquement spécialisés dans ce commerce. Ils vendent beaucoup d'autres choses, par exemple des journaux.  Or les ventes en kiosques de journaux et de magazines au numéro ont de nouveau baissé en 2014, de 7,7% pour le nombre d'exemplaires et de 4% en valeur, mais moins qu'en 2013 (-10,5% et -6,5%). Résultat: le nombre de kiosque a chuté de près d'un millier aggravant le phénomène de baisse des ventes de la presse qui, en la fragilisant, accentue sa baisse dans les kiosques subsistant, etc. On est dans une spirale malsaine. 

    Naturellement, on peut absolument soutenir qu'on se moque éperdument de la baisse des ventes de presse et que l'important est d'améliorer la santé du pays. J'en conviens, bien sûr. Hélas, il faut prolonger le raisonnement. Il est rarissime que les bureaux de tabac ne vendent que de la presse et du tabac. Ils vendent d'autres produits de première nécessité.

    Qu'ils disparaissent en ville n'est pas un problème. Mais à la campagne, c'en est assurément un et ça fragilise des zones qui n'ont pas besoin de ça. Or, le géographe Christophe Guily avait parfaitement raison, malgré la charge dont il fut l'objet, de mettre en évidence que les zones rurales sont des zones de nouvelle pauvreté. Il faut ne pas les connaître pour soutenir le contraire et j'ai trouvé infiniment parisien le débat qui visait à le clouer au pilori. Oui, bien sûr, les zones rurales souffrent. Oui, bien sûr, tous les chiffres le montrent, elles tendent à concentrer des populations chassées des zones urbaines par les coûts de l'immobilier.

    Or, la régression du niveau de services qu'on y dispense, par exemple avec la fermeture massive des bureaux de postes, avec le départ des médecins vers des zones urbaines où la diversité des possibilités est meilleure, est une incontestable réalité. Au point, comme l'on sait, que des programmes massifs de soutien à leur implantation en zones rurales existent... avec bien peu de succès. Ce n'est pas par hasard. Et ceux qui soutiennent le contraire ont, à mes yeux, un détestable mépris du peuple des campagnes dont ils ne savent rien.

    Personne, bien sûr, ne peut souhaiter une dégradation de la santé publique. Mais il ne faut pas se masquer les choses: il y a un effet pervers dans cette mesure qu'il faut essayer de pallier. Le problème est que ce sont les mêmes qui lancent ce programme d'anonymisation qui soutiennent, au nom de la rationalisation budgétaire, la désertification des campagnes en services. Dans ces conditions, il est un peu difficile de se donner bonne conscience au nom de la santé publique. Du moins, il devrait l'être.


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  • Les événements de ces dernières semaines ont redonné un coup de jeune à une certaine posture convenue du « À moi, on ne me la fait pas, tout ce qui arrive est une mise en scène ». Tout est manipulation et, évidemment, tous ceux qui savent en dénicher une sont plus malins que les autres. J'avais déjà relevé cette attitude en janvier, lors des attentats de Paris, attitude un peu hautaine, condescendante, affectant une connaissance bien meilleure que celle d'autrui, manière aussi de se situer au-dessus de la mêlée, voire au-dessus des autres, tout simplement. À moins qu'il ne s'agisse, dans bon nombre de cas, d'une manière de dissimuler de lourdes failles psychologiques quand ce ne sont pas des pathologies.


    Eh bien moi, on ne me la fait pas.
    Parce que je vois, en réalité, dans ces postures qui se veulent distinguées une grande fragilité de l'esprit, l'absolu besoin de voir derrière tout événement une obscure construction, une intrigue bien menée, des chefs secrets. Construire ainsi sa pensée, c'est présupposer que, dans la marche du monde, tout est sous contrôle. Je n'y crois pas un instant.

     Non, les foules de réfugiés ne se sont pas mises en route – en dehors du fait qu'elles l'étaient depuis longtemps- sur un coup de sifflet. Il y a bel et bien eu conjonction de décisions isolées de milliers de moins-que-rien et s'il est évidemment vrai qu'une fois le processus engagé - je dis bien: une fois le processus engagé- les gouvernements, les partis essaient de tirer leur épingle du jeu, ils ont été des marionettes d'un mouvement qui leur échappait.

    On ne rappellera jamais assez les circonstances de la chute du tout puissant pouvoir soviétique qu'aucun des fameux "kremlinologues", comme l'on disait alors, n'avait vu venir. Non point parce que, du fond d'une grotte, ou d'un bureau de la CIA un mystérieux gourou manipulait tout. Ce sont les simples gens qui ont fait tomber le pouvoir soviétique, le syndicat des ménagères.  Il y a des mouvements qui viennent d'infiniment plus grandes profondeurs que le pouvoir, voire la raison et que nul ne peut prétendre inspirer. Ils sont animés, en effet, de ces choses étranges que sont le mal-être, la peur, la folie. Or rien de tout celà ne se prédétermine. Il n'y a personne dans la grotte.

    Il y a ceux, j'en conviens, qui tiennent des langage de peur pour arriver à leurs fins. Mais ils ne font qu'embrayer sur un mouvement qui préexiste dans l'âme d'une nation. Et ils n'y sont pour rien. À bien y penser, cette situation est beaucoup plus inconfortable pour l'esprit de chacun d'entre nous. Elle interdit une certaine commodité de pensée. Elle nous impose d'admettre qu'il y a des forces immaîtrisées qui courent. Et qui s'imposent.


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  • Petite histoire d'un embarras extrêmeLe flot de réfugiés qui nous parvient et l'accueil très remarquable que les opinions publiques ont manifesté à leur égard ont contraint un bon nombre de politiques à des pirouettes tout à fait amusantes. La plus ahurissante est celle de Cameron qui se met probablement dans un mauvais cas. En l'espace de 24 heures, comme l'on sait, il a subitement déclaré qu'il était prêt  à être beaucoup plus généreux dans l'accueil, en totale contradiction avec ce qu'il disait quelques heures plus tôt. Comme tous les autres, il s'est fait piéger par l'attitude de très grande ouverture de Merkel qui aurait du être une de ses alliées. Or, pour lui, les choses sont très graves. Comme l'on sait, il se feint promoteur d'un proche référendum sur l'appartenance de la Grande-Bretagne à l'Europe. En vérité, il est hautement probable que, dans son for intérieur, il n'a aucune envie de quitter l'Europe, mais il espère qu'en prenant cette attitude jusqu'au boutiste, il obtiendra de larges concessions de Bruxelles. Du reste, on les voyait venir. Mais pour cela, il lui faut avoir Merkel dans son sac. Or, la chancelière allemande a tellement pris ses homologues en contre pied qu'on assiste à de l'équilibrisme comique. Il est hautement probable que pour Cameron, la négociation avec ses partenaires va devenir plus tendue avec, pour lui, un lourd enjeu de politique intérieure. Au passage, ne mésestimons pas dans l'affaire l'enjeu de leadership européen qu'elle comporte.

    En France, on s'amusera de Ciotti qui, en quelques jours, a diffusé des tweets en sens radicalement inverse, mais on est là dans les seconds rôles. Le spectacle des Républicains, condamnés - à nouveau par difficulté à apparaître en contradiction avec une vieille alliée conservatrice, Angela Merkel- à des propos vaguement techniques sur le sujet pour éviter d'être trop tranchants, a un petit côté réjouissant.

    Certes, le ralliement de Juppé et Raffarin à l'éventualité d'une opération militaire en Syrie confirme dans le sentiment qu'on est là en présence d'une droite qui ne va pas jusqu'à l'hystérie, ce qui est infiniment reposant. Mais pour la droite plus globalement, la situation est très inconfortable. Personne ne comprendrait que ses chefs s'affichent contre Merkel qu'ils citent à tout bout de champ sur d'autres dossiers.  La logique pousserait pourtant les Républicains à concurrencer Marine Le Pen, mais, dans les heures que nous vivons, un peu de morale, tout de même, ne fait pas de mal.

    Petite histoire d'un embarras extrêmeEt voilà enfin ce pape François, décidément épatant, qui va accroître l'embarras général en incitant chaque paroisse à recevoir des réfugiés. On imagine comment vont le digérer tous ceux, de plus en plus nombreux, qui se réclament bruyamment d'un catholicisme de reconquête et qui ne sont pas loin dans les couloirs de l'opposition française. 

    Je dois dire que la position du groupe de Viesgrad regroupant, Pologne, Hongrie, république tchèque et Slovaquie pour affirmer qu'ils ne veulent pas entendre parler des quotas est un peu forte de café. Car enfin les Hongrois ont été formidablement reçus en 1956, comme le rappelle justement la presse suisse, et les Polonais n'ont pas été les derniers à provoquer de forts mouvements migratoires dans le passé. Par ailleurs, les uns comme les autres ont été inondés de crédits bruxellois. Franchement, un peu de reconnaissance...

    Ceci dit, une jolie tribune du New York Times dit la honte ressentie face au nombre dérisoire (1200) de réfugiés syriens reçus aux États-Unis ou au Canada. Oui, il y a de quoi.

     


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  • Nous assistons à un raz de marée d'humanité après des d'indifférenceLes Britanniques aussi peuvent être formidables. Adam Kelwick, un responsable musulman de Merseyside, en partance pour Calais qui est l'objectif de nombreux convois de secours,  a reçu du supermarché local des matelas gonflables, des jeux, des vêtements, alors qu'il était seulement venu demander une réduction sur des tentes. Le maire de Liverpool lui a mis à disposition des voitures et des camionnettes. Cela après seulement vingt quatre heures de sensibilisation.

     

    Nous assistons à un raz de marée d'humanité après des années d'indifférenceUn prêtre de Belfast qui avait, en son temps, été un leader farouche pro-protestant est en train de préparer des logements pour des réfugiés syriens.Bob Geldof va accueillir trois familles à son domicile privé. The Migrant Offshore Aid Station (MOAS) a reçu en une journée 50 fois plus de dons qu'il n'en recoit à l'accoutumée soit 734 000 livres et la participation d'écrivains connus à une collecte a ramené 270 000 livres en une après-midi. Selon l'excellente formule du directeur de MOAS: " Nous assistons à un raz de marée d'humanité après des années d'indifférence ».

    Au demeurant, l'attitude de Cameron pourrait avoir une incidence tout-à-fait inattendue. La presse évoquait volontiers jusque là l'éventualité qu'il veuille surtout par son projet de référendum anti-européen faire peur à Bruxelles et obtenir des concessions. Or, son attitude de fermeté par rapport aux réfugiés pourrait lui valoir l'hostilité de Merkel. Et Merkel, en Europe, elle pèse lourd. Moyennant quoi tout le stratagème de Cameron s'effondrerait par le surgissement d'un dossier auquel personne ne pensait jusque là, les migrants.

     

    Nous assistons à un raz de marée d'humanité après des années d'indifférence


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  • Il y a une manière de génie dans l'extrême-droite à véhiculer en son sein des haines incommensurables. J'engage ceux qui en douteraient à visionner ce montage que j'ai fait d'un entretien entre deux dirigeants d'extrême-droite: Vincent Reynouard, dans la vidéo le questionneur et celui que l'on voit à l'écran, Jérôme Bourbon, le patron de l'hebdomadaire Rivarol qui fédéra dès l'après-guerre les pétainistes, les antisémites, les révisionnistes, etc. Au passage, petite surprise: Vincent Reynouard était censé être en prison pour récidive dans ses propos révisionnistes après une condamnation à une peine ferme. Mais la justice, dirait-il, est sans doute trop douce...

    Au passage, on notera le licenciement de Martial Bild de Radio Courtoisie par Henri de Lesquen, patron de cette radio au motif que Martial Bild travaillait aussi pour la TV d'extrême droite, TV Liberté et un autre licenciement à Présent, tous pour diverses divergences idéologiques qui, étant donné l'incroyable proximité d'idées de ces hommes, révèle des querelles microscopiques mais non sans conséquence.

    Rien que du beau monde, en tous cas qui fait dans le délicat. On le voit ici dans le tombereau d'insultes que Jérôme Bourbon déverse sur Marine Le Pen.

    En revanche, on reste assez stupéfait de voir la rédaction d'I Télé confiée à un catholique traditionnaliste, collaborateur de Boulevard Voltaire et épisodique participant à Radio Courtoisie.


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