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Par gervanne le 12 Décembre 2014 à 23:52
Ainsi donc, il arrivera un jour - enfin on nous l'assure- que les parfaits salopards qui ont poussé des salariés de France Télécom au suicide par harcèlement soient condamnés. C'est ce qu'annonce la presse. Mais elle ajoute ce que l'on va lire ci-dessous.
Et bien moi, les gars, je ne l'aurais sûrement pas dit comme celà. Parce que je déteste le sous entendu au demeurant parfaitement explicite qui est là-derrière. Il y aurait eu des "pauvres salopards", des "dégueulasses en mission", des chiens "qui ne faisaient que leur boulot". Je ne sais pas bien s'il faut hiérarchiser. Quelque part, dans des bureaux loin de tout, des immenses importants, dans un absolu mépris pour leurs salariés qu'ils voyaient en photos dans les bilans sur papier couché de fin d'année, ont estimé que ces manards ne foutaient rien et qu'il leur fallait des coups de pied dans le cul. C'est pas glorieux, c'est sûr et c'est plein de morgue et de mépris.
SOUMISSION COMPLAISANTE.- Mais l'immonde qui harasse le petit mec qui est juste au dessous, la gaillard qui se fait reluire en regardant le quelconque avec un regard supérieur, le collabo en puissance, je ne suis pas sûr d'avoir beaucoup de mansuétude pour lui. Je sais bien qu'être esclave en chef, c'est mieux qu'être esclave de base mais lorsque la compétition se fait dans la veulerie, la soumission complaisante, et l'indifférence aux souffrances de ceux que l'on voit tous les jours, je ne sais pas ce que je préfère.
Notez bien que la morale est sauve avec cette autre coupure de presse: celui qui a révélé les bidouilles fiscales peu glorieuses au Luxembourg de la part de multinationales a été inculpé. C'est chouette: on est bien gouverné.
Ceci dit, j'aimerais être dans la tête du personnage ou plutôt, peut-être, dans son coeur. Voilà un type qui a été dans le système pendant des années et puis qui, un jour, a trouvé que c'était trop dégueulasse. J'aimerais connaître son évolution psychologique, ce qui l'a fait basculer. J'ai oublié de vous dire: M. Junker, lui, va très bien.
2 commentaires -
Par gervanne le 4 Décembre 2014 à 17:54
Nous avons tous besoin de mythes, de belles histoires qui nous racontent. L'actualité nous le rappelle sans cesse. Choisissez celui qui vous plait: celui du Grand Israël, de nos ancêtres les Gaulois, de Guillaume Tell ou d'une terre arabe - l'oumma- qui devrait être consubstantiellement musulmane. Tout ceux-là sont des constructions. Souvenons-nous de Napoléon III qui paie, sur sa propre cassette, des fouilles archéologiques pour qu'on retrouve des traces de la bataille d'Alésia. La vérité est que le personnage de Vercingétorix (PHOTO) nous est très mal connu. De même que l'existence véritable de Guillaume Tell est hautement douteuse. Le mythe du Grand Israël ne se comprend que par opposition aux terribles persécutions antijuives qui nécessitaient comme en réponse un espoir d'autant plus grand.Et ainsi de suite.
PART DE VÉRITÉ.- Le problème est que la quasi-totalité des grands mythes (peut-être pas l'Atlantide) comporte une part de vérité. C'est même une des conditions pour qu'ils marchent. Il y eût assurément une résistance acharnée de certaines tribus gauloises aux troupes romaines. On le sait par César. De même de la part d'Helvètes face aux fonctionnaires de l'Empereur du Saint Empire Romain Germanique. Et il est encore assuré qu'il y eût des juifs dans tout le Proche Orient, dont la Palestine. Ou encore que les Arabes se sont taillés un succès qui a du les éblouir eux-mêmes dans tout le Proche-Orient. A partir de là, on brode. On est dans le roman. On gomme les détails gênants Deux exemples à propos de l'inventaire que je viens de faire: les musulmans se gardent bien de dire que l'ahurissant succès que leurs troupes remportent en Afrique du Nord doit beaucoup à ce que les troupes qui gagnent victoire sur victoire appartiennent à des formes dissidentes de l'islam contre des populations qui elles-mêmes sont en dissidence. C'est toute l'histoire du "donatisme" en Afrique du Nord (du nom de l'évêque Donat), dissidence de la chrétienté qui se considère comme plus pure que la chrétienté romaine. Ce qui fait qu'en quelque sorte, "entre dissidents" on s'est très vite entendu. Et beaucoup de victoires sont bien plutôt des ralliements. De même, assurément, il y eût des juifs en Palestine, mais en Palestine notamment. Il y eût les royaumes juifs du Yemen (vers lequel ne va tout de même pas aujourd'hui la revendication du Grand Israël) , les formidables colonies juives d'Alexandrie, de Babylone et d'ailleurs. C'est à dire que de deux choses l'une: ou bien on revendique un lien exclusif avec tous ces territoires ou bien... on reprend un magnifique récit mythologique, celui de l'Ancien Testament, en affirmant que chaque phrase est vérité historique.
PERSONNE N'A LES CUISSES PROPRES.- Nous nous sommes tous servis au moment opportun de ces grands mythes. Lors de la guerre de 14, nous avons ressorti les Prussiens barbares. Beaucoup plus près de nous Sarkozy a réactivé les "racines chrétiennes de l'Europe", mélange confus de vérités, d'approximations et d'oublis. Donc personne n'a les cuisses propres. Comme dit très bien le titre d'une émission: il y a bien fabrique de l'Histoire.
L'affaire a repris de l'acuité ces derniers jours lors de la crise ministérielle israélienne qui va aboutir à des élections législatives en mars prochain. Avec le risque de Netanyaou s'ancre davantage encore du côté des grands fabriquants de mythes que sont les ultra-religieux. Il est juste de dire que toute une partie de l'opinion israélienne est opposée à cette idée, à commencer par les deux ministres qui ont été virés du gouvernement. Mais en situation de grande détresse psychologique collective comme c'est le cas en Israël, en ce moment (mais comme ça l'est globalement au Proche-Orient) la réactivation des grands mythes est une arme dévastatrice. Voyez l'horreur de l'État Islamique.
Et nous ne devons jamais perdre de vue que le fameux "story telling" des officines politiques active les mêmes ressorts. On ne fabrique peut-être pas des grands mythes, mais des petits mythes. Peut-être moins dangereux, mais dangereux tout de même. Je n'en ai qu'une admiration plus vive pour tous ceux qui tentent de raison garder.
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Par gervanne le 30 Novembre 2014 à 07:47
Je viens de lire une Histoire de la Haine de Frédéric Chauvaud qui incite à la réflexion. Au fond, nous avons un besoin secret de la haine. Détester est reposant, ça vous justifie. L'autre est si mauvais, méchant, nul, nocif. Pas besoin de réfléchir sur ses propres arguments, l'autre est au mieux un con, au pire un salaud.
Chauvaud fait une manière de Michelin de la haine: la haine politique, la haine entre classes sociales, la haine des femmes, etc. C'est un travail universitaire, ça n'est pas un polar. Mais le recensement est intéressant.
Demeure un fait très frappant: c'est l'immense besoin de haine. Je suis accablé, en fréquentant le net, de voir combien peu de commentaires sont favorables quel que soit le sujet. Combien même le ton monte à l'hystérie. Tel raisonnement n'est pas "contestable", mais "débile". Tel personnage est "nul", mais pas "discutable". On est à 200 à l'heure dès les premiers mots. C'est assez préoccupant. Parce que cela nous désigne une appétence du public pour la détestation qui est extrêmement peu productive.
FAIBLES ENTHOUSIASMES.- Car, en sens inverse, je remarque combien sont faibles les enthousiasmes. Telle entreprise réalise une prouesse technologique? Oui mais c'est pour gagner du pognon. Tel match a vu une victoire inattendue? Bien sûr, il était truqué, etc.
L'incapacité de la parole politique à prendre le courage de prêcher le compromis est affligeante. Lorsque chacun d'entre nous, par simple bon sens, voit combien des hommes apparemment éloignés devraient, en fait, s'entendre, la posture du refus (bien sûr le refus de la "compromission"!...) est la règle.
Il y a des lieux du monde, la Palestine, le Pakistan, l'Ukraine où la haine a atteint une telle densité qu'elle est devenue comme solidifiée. Vous voulez gâcher une soirée? Parlez de la Palestine entre amis. J'étais frappé, l'autre jour, de lire dans le Haaretz, le grand quotidien de gauche d'Israël, une tribune de l'ancien directeur général du Mossad, le service de renseignement israélien, qui disait sereinement qu'Israël et le mouvement sioniste vont dans le mur. Alors que de lui, on eût attendu un discours brûlant de la volonté d'en découdre. Je me suis dit que cet homme avait un grand courage et probablement était un bel esprit. On ne peut pas oublier que les hommes qui sont restés dans l'histoire (Nelson Mandela et Frédérik De Klerk, De Gaulle et Adenauer) sont ceux qui avaient toutes les raisons de rester dans le registre de la haine mais qui l'ont surmontée.
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Par gervanne le 13 Novembre 2014 à 23:43
Il se trouve que je me fous totalement de savoir si oui ou non Jouyet et Fillon ont mangé ensemble. Éventuellement, je serais intéressé de connaître le menu. Particulièrement le dessert.
Il se trouve que je me fous totalement de savoir que l'UDI, qui tient ses assemblées générales dans des cabines téléphoniques, a élu un élégant petit porcelet à sa tête, qui sera oublié vitesse Grand V.
Il se trouve que je me fous d'autant plus d'apprendre que Bernard Cazeneuve interdit l'usage des grenades offensives que je croyais qu'il l'avait déjà fait. Du reste, pour tout aggraver, je ne parviens pas à comprendre comment trois jours après un évènement où il y a mort d'homme, on ne connait pas rigoureusement tout jusqu'à la couleur des chaussettes du tireur.
FESSES HUILÉES.- Il se trouve que je me fous d'une force inouïe que Kim Kardashian montre ses fesses (qu'elle a jolies) au Metropolitan Museum. D'ailleurs, je ne sais pas qui est Kim Kardashian et je n'en conçois pas la plus petite gêne. (Ayant vu ses fesses dans la presse, je crois utilement compléter en donnant ici une photo qui ouvre des perspectives sur le restant de sa physionomie. Et ayant finalement appris - pour les besoins de ce post- qu'elle est supposée être une intervieweuse de la télévision américaine, j'ai été, à la seule vue de sa photo, convaincu dans l'instant que seules ses qualités d'intervieweuse lui avaient valu d'être recrutée. Ca tombe sous le sens. Quant aux sens, ça les émoustille. La presse qui, par sens éthique, ne néglige aucun détail, précise que ces fesses présentées au Met ont été huilées, information, j'en conviens, d'une urgence absolue. Comme on disait, lorsque j'étais jeune journaliste: "Arrêtez les rotatives"!)
Tout ceci n'aurait aucune espèce d'importance si ces informations que je viens d'égrainer ne constituaient les titres majeurs de la presse du jour. Et il se trouve que j'ai quelques instants pour l'écrire aujourd'hui. Mais il en va ainsi chaque jour. Rien de ce que je lis - et particulièrement pas s'agissant de Mme Kardashian (Dieu sait que j'aime les interviews)- ne correspond à ma vie.
La domination du futile, jusque dans des sujets supposés sérieux constitue une performance inégalée. Elle participe d'une manoeuvre dont je finis par penser qu'elle est délibérée pour nous faire regarder ailleurs. Le problème est que l'acharnement dans l'insignifiant finit par convaincre que ce qui se passe vraiment, n'est précisément pas ce qu'on nous montre.
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Par gervanne le 25 Octobre 2014 à 00:51
Je me retrouve dans un petit village de ma région dans une réunion où un spécialiste de la maison respectueuse de nos vies - la maison saine- fait un exposé apocalyptique de ce qui nous menace à l'intérieur de nos maisons: les hautes et les basses fréquences, le radon, les acariens, les pollutions innombrables. Mon vieux père disait: "On en meurt ou en reste idiot".Et ceux qui prétendent que ça n'est pas vrai sont de supposés experts qui ont des intérêts dans les multinationales. Personne ne semble remarquer que l'intervenant lui-même fait profession de concevoir des maisons de ce type. Il y a un non-dit permanent qui est qu'un éventuel contradicteur serait un salaud. On n'est pas dans le débat, on est dans le matraquage. C'est dégoulinant de technique. Et à mon avis, largement vrai. Dans ces domaines où je ne connais rien, je ne me hasarderais pas à contredire quiconque. Mais le ressort de tout cela est la peur. Et il est frappant d'entendre par moment des frémissements dans la salle, frémissements feints peut-être, mais qui disent bien l'ambiance. Surtout qui nous disent bien l'époque car il y a dans ces frissons une manière de délectation dans la conformité à l'époque. Pour le dire autrement: ce que notre époque a produit est mauvais d'une manière intrinsèque.
BISTROT.- Il se trouve que, arrivant pour cette réunion d'un autre reportage, j'ai dîné, une demi-heure avant, dans le bistrot du coin, sous sa télévision. Et je me suis colleté là avec la distillation de la peur venue de Montréal et des États-Unis par l'habituel reporter planté devant un bâtiment officiel faute de pouvoir faire quoi que ce soit d'autre. La peur, là encore et avec un islamiste musulman: du gâteau.
Quelques heures avant, roulant en direction de la Drôme, j'écoutais Science Publique de Michel Alberghanti sur France Culture où j'entendais le pourcentage dérisoire d'élus nationaux ou de conseillers de haut rang qui aient une formation scientifique - en l'espèce un master d'une quelconque discipline scientifique. En clair, nos décideurs politiques, dès qu'ils ont à prendre une décision scientifique sont dans le coltard, répercutant donc les peurs qu'ils entendent dans leur électorat. Il ne leur reste que ça. Ils n'ont pas l'environnement scientifique, l'"équipement conceptuel" pour juger correctement.
SCIENCE ET TECHNOLOGIE.-Et un des intervenants faisait justement remarquer la confusion généralisée entre science et technologie. Il est par exemple clair que pour le moment ni les technologies de la fracturation des roches pour extraire le gaz de schiste, ni celles des OGM ne sont au point. Les effets colatéraux sont trop graves pour qu'on les accepte. Mais c'est de l'obscurantisme absolu de refuser à des scientifiques de mener des recherches dans ces domaines. Je suis frappé, à cet égard, de ce que des gens qui passent des heures à asséner des démonstrations scientifiques bloquent soudain sur l'idée qu'on poursuive les recherches. Ceux-là qui veulent nous convaincre "rationnellement", par un glissement subit, passent dans l'émotionnel. Naturellement, je sais bien pourquoi: ils ont l'intime conviction, comme le sympathique garçon de ce soir, que d'éventuelles recherches seraient menées par des groupes intéressés. Et ce n'est pas sans fondement. Mais de là à refuser toute recherche, il y a un pas intolérable. D'autant moins tolérable que je me méfie de certaines convergences. Qui est le grand gagnant de l'élimination des recherches OGM de France (notamment de Limagrain, par exemple)? L'américain Monsanto entre autres, sans parler des autres concurrents qui ont vu avec satisfaction s'éloigner la menace française. Fortuitement? Je serai mort lorsque les archives s'ouvriront mais je regrette à l'avance de ne pas savoir ce qu'elles révéleront. Il ne faut pas me prendre trop pour un con.
MARX REVIENT!.- Et, sur ces sujets, l'irrationnel est devenu tel qu'il faut renoncer à argumenter. Je lisais l'autre jour un débat quelconque sur internet sans le moindre rapport avec les OGM. Et soudain tomba la phrase qui désintégrait l'opposant: "De toutes façons, il est pour les OGM". Expliquez moi: c'est l'équivalent de pédophile? On voit bien là que, soudain, on est dans la morale - ou dans une supposée morale. On touche au dogme. Marx revient! Ils sont devenus fous.
Mon soupçon est que nous avons besoin de la peur. Elle justifie des irrationnels lorsque précisément nous ne voulons pas de rationnel, nous voulons nous évader, chercher ailleurs les clés de notre monde. La peur est mobilisatrice. Que les choses soient claires: je n'accuse en rien ce malheureux intervenant, qui disait par ailleurs des choses pleines de bon sens, d'être de ceux qui la manipulent. Mais il y en a qui le font. Et le terrain est favorable. Au surplus, c'est ce qui est de plus simple à faire.
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Par gervanne le 18 Septembre 2014 à 16:35
Je suis extrêmement frappé de l'ampleur du désarroi que renvoie ce que l'on peut connaître de l'opinion. J'ai déjà eu l'occasion d'écrire ici ce que je pensais de la diffusion si large désormais des théories complotistes. Mais il y a davantage. Je vois bien sur les réseaux sociaux - parfois en réponse à quelques uns de mes écrits- des délires qui m'inquiètent. La moindre des choses serait en fait décidée dans le bureau ovale de la Maison Blanche. Tout serait voulu par une oligarchie secrète qui, j'imagine, se réunit la nuit, encagoulée dans les caves de Londres.
Je vois bien qu'il y a, là derrière, des prémisses exactes. Il est incontestable que des grandes écoles ont créé le moule d'une classe dirigeante standardisée. Il est incontestable qu'existe un discours commun de ces élites dont on voit bien qu'il suscite une défiance croissante, parfois pour l'unique raison qu'il est précisément tenu par cette élite.
CONFORTABLE.- Mais je refuse de faire le saut que j'observe si souvent qui voudrait que cette élite dirige pour de bon, que le monde lui appartienne. Je vois parfaitement ce qu'il y a de confortable à développer des raisonnements sur ce mode. Cela induit que quelque part une impulsion est donnée, que nous sommes les esclaves d'une volonté secrète.
Je n'y crois pas. Ces raisonnements nous arrangent. C'est bien pire. La théorie du/des chef/s d'orchestre clandestin construit un monde qui suivrait un itinéraire préétabli. Il n'y a pas d'itinéraire. Il y a un affrontement de forces volontaires (dont celles des élites, d'accord) et puis il y a l'immensité du marais. Et ce marais offre une résistance qu'on mésestime totalement même si, par définition, il n'est pas organisé. Sur un certain nombre de thèmes, des forces infimes en regard de celles des élites, ont fini par travailler le marais et s'imposer aux élites. Qui voulait de l'écologie? Qui voulait de la transition énergique? Qui se souvient de l'immensité des forces qui étaient derrière l'URSS et qui ont du plier? Qui voulait même des formes de la démocratie qui, malgré des revers, avancent, notamment par la circulation des idées qu'ont imposé les réseaux sociaux? Simplement, il est accablant des voir ceux-ci servir à relayer les voix de la grande déprime, les théories bidons et les humeurs dont certaines sont particulièrement toxiques. Elles sont les marques d'un affaiblissement de la pensée, de la vigilance dans le raisonnement.
PLACARD.-Ceci posé, je comprends le désarroi. Je le ressens moi-même. D'ailleurs je le vois jusqu'au sommet, précisément jusqu'à ces élites. On le voit à la présidence de la république française. C'est un signal d'un désarroi absolu que de voir ses opposants, la droite, ressortir le même candidat à la prochaine présidentielle, tout simplement parce qu'elle ne sait plus où elle veut aller. Elle ne produit plus de forces nouvelles. On ressort un gaillard du placard.
Le monde est devenu illisible. C'est très déstabilisant. Des forces émergent mais pour quelques années puis disparaissent. Notre vrai défi est d'assumer cela. Il est autrement courageux d'accepter cette grande errance que de se raconter un thriller dont ni les personnages ni le scénario ne convainquent. Et assurément, une pathologie de ce temps, dont les réseaux sociaux permettent qu'elle se répande comme un virus, est cette forme de désarroi.
PS.- Je viens d'écouter la conférence de presse de Hollande qui a été assez bonne et, sur le point précis que j'évoque, explicite. Je me dis que ce ne doit pas être marrant d'être à ce poste en sentant son propre peuple dans tant de désarroi.
JE REMERCIE CEUX QUI VEULENT COMMENTER DE LE FAIRE ICI. QUELLE QU'AIT ÉTÉ MA CARRIÈRE ANTÉRIEURE, CE BLOG N'EXPRIME PAS LES OPINIONS DU JOURNAL LE CRESTOIS MAIS LES MIENNES PROPRES.
3 commentaires -
Par gervanne le 8 Septembre 2014 à 17:18
Nous n'avons aucun problème avec les Arabes. Pas le moindre. Ni avec les Roms, ni avec les Maliens. Nous avons un problème avec les pauvres. Ils sentent un peu mauvais (cf Chirac), leurs vêtements sont déglingues (ces terribles survets sans forme véritable, sortes de sacs pour cacher la misère). Ils parlent plus ou moins bien, faute d'avoir été longuement à l'école. D'ailleurs, franchement, est-il bien sûr que nous ayons une tendresse plus grande pour nos pauvres à nous?
BESOIN DE DÉTESTATION.- Mais le pauvre arabe (ou Rom ou Malien), l'avantage supplémentaire qu'il offre dans notre besoin de détestation, dans la nécessité d'avoir un ennemi, c'est qu'il est visible. Et puis, il y a le mystère inquiétant. Très important, ça, le mystère inquiétant, sinon comment construire une figure d'ennemi vraiment menaçante? Évidemment, le mystère inquiétant, pour l'Arabe, c'est l'islam. Personne n'y connaît rien – j'inclus là-dedans pas mal d'Arabes eux mêmes. Le Coran, texte établi autour du X° siècle de notre ère est incompréhensible aujourd'hui. On peut aligner des mots qui semblent donner un sens, mais pour ce que vaut une reconstruction onze siècle plus tard... La Bible elle -même de quinze siècles au moins aînée du Coran est extrêmement compliquée. On peut entendre des passages mais sans recontextualisation, la lecture n'a aucun sens véritable. Elle laisse à la surface. Comme pour le Coran.En vingt ans de carrière où j'ai particulièrement fréquenté ces sujets (sans parler de ma carrière antérieure), je n'ai jamais rencontré le moindre théologien, le moindre historien des religions qui ose prononcer ces qualificatifs que l'on entend constamment de la part d'ânes hautains et prétentieux comme "obscurantisme", "dangereux", etc. Lorsqu'on parle de textes vieux de 1100 ans, ces mots n'ont aucun sens et ceux qui les prononcent sont ridicules.
Mais - parce qu'étranger à notre culture- le Coran fait peur. Deux anecdotes. J'ai été sollicité, une fois, pour animer une table ronde dans une immense rencontre inter-religieuse. J'étais au milieu de la tribune devant une salle – en fait une grande tente- qui devait bien accueillir trois cents personnes. Soudain, au premier rang, une vieille dame exquise demande la parole. On aurait voulu la serrer dans ses bras, tant elle faisait penser à sa propre grand mère. Et la voilà qui ouvre la bouche et sort un torrent de haine vis-à-vis des musulmans qui, si je me souviens bien, allaient assurément violer sa petite fille qui louait un appartement en dessous d'une famille musulmane. A mesure qu'elle parlait, je sentais mon corps se glacer. Et lorsqu'elle se tût, mon coeur battait et je ne savais à qui donner la parole pour tenter une réponse. A ma droite, se trouvait le remarquable historien des religions Albert de Pury, personnage plein de culture et d'humour qui demanda à intervenir. Je le vis ouvrir un livre où je voyais des passages surlignés, preuve qu'il avait un numéro très au point. Et il lut un extrait terrifiant de haine. Puis il conclut: “Voyez vous Madame, ceci est dans la Bible”.
L'ENNEMI, CA SE CONSTRUIT.- Une autre fois, je me trouvais au Caire où j'enseignais le journalisme à des jeunes égyptiens. Je venais de sortir un livre en France. Et un des Volontaires du Service National, attaché à l'ambassade qui me facilitait la tâche dans ses aspects pratiques, vint me voir pour me dire: “Puisque tu as des introductions dans le monde de l'édition, je voudrais que tu m'aides à faire un bouquin sur la réalité de l'islam au Caire, que je connais bien. Tu sais, les imams dans les quartiers, ce sont des assistants sociaux. Alors, il y a ce que le Coran est supposé leur imposer de faire ou de prescrire. Et puis il y a la réalité. Des gars qui ferment les yeux sur des avortements, qui essaient de mettre de l'huile dans les rouages.” J'allais voir mon éditeur, une maison très connue, je lui parlais de ça. Il me répondit fermement: “Pas question. Nous nous voulons des livres qui mettent en cause l'islam dans les quartiers.” J'ai entendu parlé de ce gaillard quelques années plus tard comme animateur d'un think tank libéral. Dans quel sens du mot?
Les ennemis, ça se construit. Et si, en plus, ils peuvent être pauvres...
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